EDITORIAL : Derrière l’apparence des mots, la réalité des faits

Nous rappelons que le Délégué laïque a été conçu pour permettre la circulation d’informations et la possibilité de débats libres entre DDEN, car il apparait clairement qu’une « normalisation » est en cours au sein de la Fédération nationale des DDEN, « normalisation » conduite sous la houlette de son Président Eddy Khaldi.

Sont ainsi considérés comme « hérétiques et déviants » tous les DDEN qui ne sont pas le doigt sur la couture du pantalon, en extase réglementaire devant le « Président Khaldi ».

Nous publions dans ce numéro la circulaire de celui-ci qui rend compte du Congrès national de Rennes. C’est à proprement parlé totalement stupéfiant. Ouvrir un congrès national d’une association de défense de l’Ecole publique laïque en faisant un procès public de type « stalinien et inquisitorial » contre un modeste bulletin numérique, révèle clairement que le colosse a des pieds d’argile.

Faut-il que la cause soit si mauvaise pour agir avec une telle haine sectaire ?

Sur les parvis circulent que la cause en serait que ces DDEN suspects appartiendraient à la Libre Pensée et « seraient politiquement engagés ». C’est le délit de « sale gueule ».

Jusqu’alors, sous la conduite fraternelle des Présidentes et Présidents de la FN DDEN, les appartenances diverses étaient sources de diversité et d‘unité. Rappelons le propos prêté régulièrement à Antoine de Saint-Exupéry : » Si tu diffères de moi, loin de me léser, tu m’enrichis ».

Ce temps serait-il révolu ?

On pourrait aisément le croire quand on voit la campagne hystérique de dénonciation des présupposés musulmans, coupables de tous les maux et suspects de toutes les turpitudes.

Tous ceux qui ne participent pas à cette nouvelle croisade sont taxés de complices de l’Islamisme politique et suspects à leur tour. C’est ainsi que la FCPE est vouée aux gémonies pour son affiche électorale. Ce qui amène le ministre de l’Education nationale à s’ingérer de manière scandaleuse dans les élections des représentants des parents d’élèves.

La révolte, l’indignation sont diversement partagées: certains s’offusquent d’un morceau de tissu sur la tête,  mais se taisent sur les milliards versés aux écoles catholiques.

Faut-il être aussi ignorants des conditions réelles dans les écoles pour ne pas s’apercevoir que l’application erronée et illégale de la « laïcité » aux accompagnants des sorties scolaires ne pourra déboucher que sur l’impossibilité de les organiser dans certaines villes et quartiers ? Cela fera-t-il avancer l’enseignement des savoirs et l’appropriation de la culture pour les élèves ? Cela facilitera-t-il l’intégration de toutes et de tous ?

Quand le gouvernement dit pour qui il faut ne pas voter, alors nous ne sommes plus en République, mais en Corée du Nord. Comment ne pas penser à Berthold Brecht :  » Quand le gouvernement est mécontent du peuple, il dissout le peuple.  »

Il est aussi éclairant d’analyser le communiqué de la FN DDEN sur les accompagnants des sorties scolaires en proposant que les DDEN se fassent les substituts des parents suspects. Est-ce là le rôle des DDEN ? Pourquoi ne pas réclamer que cela soit du personnel communal qui soit recruté pour cela ? Parce que cela irait à l’’encontre de la politique de liquidation des Fonctions publiques, politique menée par ce gouvernement en continuité des précédents ?

Est-il crédible de demander à des DDEN, souvent âgés, de faire les sorties scolaires à la place des parents ? Et après, on reprochera aux femmes musulmanes de refuser de s’intégrer… Heureusement que le ridicule ne tue plus.

On peut voir que la FN DDEN a signé le communiqué du « Collectif national laïque » qui dénonce aussi la FCPE. Quand on voit les signataires, on voit que le nombre d’associations de ce « collectif » fond comme beurre au soleil.

Où mène cette orientation ? Toutes les associations, hier fondatrices du CNAL, tournent le dos à la FN DDEN. Et l’essentiel des associations historiques de la laïcité aussi. Brillant résultat.

Comment ne pas s’étonner de l’étourdissant silence du Président de la FN DDEN sur la fin tragique d’une directrice (voir notre dossier), victime de la politique gouvernementale de destruction de l’École publique ? Pourquoi couvrir du manteau de Noé encore une fois ce gouvernement ?

C’est toujours la même question qui est posée : indépendance ou subordination !

Les DDEN n’ont pas vocation à être les collaborateurs occasionnels ou permanents d’une politique gouvernementale qui tourne le dos à la défense de l’Ecole publique laïque.

Personne ne pourra empêcher le Délégué laïque de s’inscrire dans ce débat, car il est vital pour la défense de la laïcité de l’Ecole et de l’Instruction.

Paul Feldman