EDITORIAL

Le Délégué Laïque N° 13 a ouvert la discussion entre tous les ami(e)s de l’École laïque sur la «  territorialisation de l’École publique  » que les autorités gouvernementales et de l’Éducation Nationale se proposent de mettre en place le plus rapidement possible.

Une telle orientation guide désormais de nombreux rapports plus ou moins officiels et de nouvelles mesures allant dans ce sens. Ils préconisent tous de remettre en cause le caractère national de l’enseignement public fondé sur les programmes scolaires définis nationalement par année et par discipline en vue d’examens, de diplômes et de qualifications nationalement reconnus dans toutes les conventions collectives et les statuts.

Ils préconisent un bouleversement complet de l’institution scolaire de la République, un pilier des conquêtes démocratiques dans notre pays.

Les missions officielles des DDEN consistent précisément à veiller au respect, dans toutes les écoles publiques, à égalité de droits, de conditions de la vie scolaire dignes de l’École de la République. Ils ne peuvent donc rester indifférents face à un démantèlement de l’institution scolaire, qui ne serait plus nationale, mais où chaque établissement serait sous la tutelle «d’un projet éducatif territorial».

L’École publique ne serait plus une et indivisible, mais multiple et différente d’un territoire à un autre. On ne demandera plus le diplôme ou la qualification à un jeune sortant de l’école, mais le lieu où il a été scolarisé. La porte serait ouverte pour que les parents puissent choisir l’établissement scolaire de leurs enfants en fonction de son «  projet éducatif propre  »  ! La concurrence entre établissements publics institutionnalisée, l’égalité des droits des élèves serait rapidement abolie.

C’est dans l’esprit de contribuer au rassemblement de tous les DDEN avec les associations laïques et démocratiques, les syndicats et toutes celles et ceux qui veulent défendre l’École de la République que le Délégué Laïque édite ce Numéro spécial en souhaitant le maximum de contributions au débat nécessaire pour une action commune.

Paul Feldmann

POUR LA RENTREE SCOLAIRE, LISEZ CE DOSSIER SPECIAL
«  ECOLE TERRITORIALE  »
TRANSFEREZ-LE AUX AMIS de l’ECOLE LAÏQUE

L’Éducation Nationale et ses réformes :

repères :

La 5ème République a hérité d’une Éducation Nationale instituée à la suite de lois historiques fondatrices de l’École publique, laïque, obligatoire et gratuite  :

  • Loi Guizot de 1833 instaurant l’obligation de créer une école publique primaire dans chaque Commune de plus de 300 habitants.
  • Loi Falloux de 1850 obligeant l’ouverture d’écoles de filles dans chaque Commune de plus de 800 habitants, mais l’enseignement primaire est partagé entre enseignement public et privé.
  • Loi de 1881, dite loi Ferry instaurant la gratuité de l’école primaire publique.
  • Loi de 1882 instaurant l’obligation de l’instruction primaire, la laïcité de l’enseignement public et l’obligation scolaire jusqu’à 13 ans.
  • Loi de 1886, dite loi Goblet, créant des écoles maternelles.
  • Loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État. L’État ne reconnaît et ne salarie aucun culte.
  • Loi de 1936, dite Jean Zay, instaure l’obligation scolaire jusqu’à 14 ans.

Le régime de Pétain abroge les lois laïques, rétablit l’instruction religieuse dans les horaires scolaires, étend les bourses nationales aux élèves de l’enseignement confessionnel, ferme les écoles normales, supprime les Délégations cantonales (équivalent des DDEN rétablis en 1945).

A la Libération l’Éducation nationale devient un devoir de l’État (préambule de la Constitution).

La première mesure prise par la 5ème République, suite au coup d’État gaulliste de 1958, sera l’adoption de la loi Debré le 31 décembre 1959 instituant le financement par les fonds publics des écoles privées sous contrats (à plus de 90% catholiques).

Toutes les organisations et associations laïques font signer 10  813  697 citoyens (plus de la moitié des votants aux élections législatives de novembre 1958) « pour l’abrogation de la loi Debré et réserver totalement l’effort de la Nation au développement et à la modernisation de l’École de la Nation ». 25  000 délégués des signataires adopteront le Serment de Vincennes de « lutter sans trêve ni défaillance jusqu’à son abrogation ».

Le Ministre Berthoin portera l’obligation scolaire de 14 à 16 ans, créera les collèges d’enseignement technique (CET) et les Cours Complémentaires (qui deviendront les collèges d’enseignement général).

Les réformes de l’Éducation Nationale qui suivront soulèveront à chaque fois oppositions, contestations, protestations, mobilisations qui ne se sont jamais démenties.

  • La Réforme Fouchet de 1963 : mise en place des collèges d’enseignement secondaire (CES) avec une logique de filières.
  • La réforme Fouchet puis Peyrefitte des Universités en 1967  : les étudiants avec l’UNEF y verront une sélection déguisée. La brutale répression contre les étudiants exigeant son abrogation sera la mèche qui enflammera le pays en mai-juin 1968.
  • La loi Haby de 1975, qui instaure « le collège unique », n’enraye pas les inégalités et aggrave les disparités entre établissements.
  • 1981-82  : Alain Savary crée  « les zones d’Education prioritaire » (ZEP) instituant la différenciation des établissements scolaires selon leur composition sociale.
  • Le projet de réforme Savary-Legrand préconise de favoriser « l’autonomie des établissements », leur ouverture à des « partenaires » que seraient les collectivités territoriales, associations et entreprises… La réforme est rejetée. Le Ministère propose alors… « le volontariat des établissements ».
  • La proposition du Conseil des Ministres du 2 août 1982 de mettre en place l’EIP (Etablissement d’Intérêt Public) incarne « le service public unifié » réunissant établissements publics et privés sur la base de leur propre «projet éducatif particulier ». Il s’agissait de dénationaliser l’enseignement public éclaté en une mosaïque d’établissements et de continuer le financement des écoles privées par l’État. Les contestations de cette tentative furent telles que le projet fut abandonné.
  • La loi de décentralisation du 22 juin 1983  définissait néanmoins les collèges et lycées comme des « Établissements publics locaux d’enseignement (EPLE) », disposant d’une autonomie sur un certain nombre de questions, notamment l’utilisation des moyens pédagogiques (article R 421 – 2 du Code de de l’éducation).
  • La loi d’orientation sur l’éducation de 1989, présenté par le Ministre Jospin, abandonne « le service unifié d’enseignement », mais supprime les Écoles Normales pour transférer la formation des enseignants à l’Université (IUFM), soumet les établissements scolaires au « projet d’établissement », au « Contrat Éducatif Local » et à « la communauté éducative ». Elle débouche sur « le Code de l’Éducation » qui inclut au fur et à mesure et chaque année les lois, ordonnances, décrets et circulaires édictés par l’État concernant l’Éducation Nationale.
  • La loi Montchamp de 2005 procède à l’intégration des enfants handicapés et/ou en grandes difficultés dans les établissements scolaires ordinaires sans tenir compte de la nature et du degré de leur handicap. Cela donnera « l’école inclusive » sans engagement de l’Etat de fournir les moyens adaptés nécessaire pour réussir une intégration, mais permettant par contre de réduire chaque année le nombre et les moyens des établissements et personnels spécialisés.

La situation très difficile des AESH, le plus souvent à temps partiels avec des salaires largement inférieurs au SMIC, remet à l’ordre du jour la question de la prise en charge des enfants en difficulté et/ou handicapé dans les établissements scolaires.

  • La loi de 2005 « d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école » présenté par le Ministre Fillon connaîtra, avec son « contrat première embauche » (CPE), la plus importante mobilisation lycéenne jamais vue dans notre pays. Elle sera promptement retirée.
  • Le projet de réforme présenté par le Ministre Darcos en 2008 dans le but de supprimer de nombreux postes et plusieurs disciplines parmi les enseignements obligatoires, devra lui aussi être retiré.
  • La loi de juillet 2013 « d’orientation et de programmation pour la refondation de l’École de la République » a proposé d’installer de nouveaux rythmes scolaires selon le bon vouloir des élus politiques locaux. Le rejet a été indiscutable. Elle voulait inscrire les EPLE dans leur « territoire » afin d’élaborer « les politiques éducatives » en mobilisant les ressources du territoire sur la base d’un diagnostic partagé avec l’ensemble « des partenaires » par « le projet éducatif territorial ». En clair, « une autonomie » amorçant la sortie de nos écoles de l’Éducation Nationale.

La loi définit dans ce cadre 4  « parcours éducatifs »  : les parcours Avenir, santé, artistique et culturel, citoyen. Les programmes scolaires nationaux par année et par discipline sont appelés à disparaître au profit « d’activités diverses » définies localement. La réduction des heures des enseignements fondamentaux par matière aboutit à passer de 30 heures en 5 jours de classe par semaine à 24 heures en 4 jours. Ce n’est déjà plus en allègement mais des amputations. L’Etat constatera ensuite la baisse de niveaux des élèves à leur entrée en 6ème de collège!

« La loi pour l’École de la confiance » de juillet 2019 abaisse l’instruction obligatoire de 6 à 3 ans et permet ainsi la création de nombreuses classes maternelles… dans les écoles privées sous contrat avec des fonds publics versés par les Communes. Une manne pour les écoles confessionnelles  !

La loi prétendait garantir la maîtrise des savoirs fondamentaux à tous les élèves, mais sans les moyens pour l’assurer.

L’orientation officielle vers « l’école territoriale » mènerait logiquement vers la disparition des programmes scolaires nationaux, des examens et diplômes nationaux au profit du profil individuel… qui n’est évidemment pas reconnu dans les conventions collectives et les statuts. On pourra payer un jeune à bac +2 comme un apprenti. N’est-elle pas aussi de sortir les personnels de la fonction publique de l’Etat pour aller vers le recrutement local sur la base du « projet éducatif territorial »  géré par « la communauté éducative territoriale »  ?

Tous les rapports, propositions et projets de loi, comme la loi Brisson, vont dans ce sens.

L’École de la République, face à cette entreprise de démantèlement de l’Éducation Nationale, est à nouveau sérieusement menacée. N’a-t-elle pas un besoin urgent que se rassemblent tous les amis de l’école publique pour la défendre  ? C’est à cela que le Délégué Laïque vous propose de travailler.

LA PAILLE DES MOTS ET LE GRAIN DES CHOSES

« Projets pédagogiques », « projets éducatifs d’établissement », « autonomie », « école territoriale », «l’école du futur»…

Il fut un temps où régnait une belle clarté quant au sens des mots sur les questions scolaires.

On parlait de l‘école publique laïque comme l’école de tous, la même sur l’ensemble du territoire nationale, ses institutrices et instituteurs dont le statut de fonctionnaire d’État et leur formation à l’École Normale garantissaient un enseignement basé sur des programmes scolaires nationaux par année et par discipline avec l’emploi du temps hebdomadaire obligatoirement affiché dans la classe… Le Maire, quel qu’il soit, fournissait les locaux et les équipements. L’Inspecteur surveillait la bonne marche des classes et l’efficacité des maîtres dans les apprentissages. Les élèves apprenaient leurs leçons et faisaient leurs devoirs corrigés en classe par et avec le maître ou la maîtresse.

Les résultats étaient au rendez-vous. Les enfants de parents illettrés apprenaient à lire, écrire compter et les connaissances que les programmes définissaient par matière, âge et niveau scolaire. On avait le certificat d’études avec moins de 5 fautes dans une dictée d’une page. Le certif. ouvrait la voie aux études ou une formation professionnelle. Le pays était alphabétisé et les classes dites de perfectionnement prenaient en charge les élèves en difficulté et l’enseignement spécialisé les victimes d’un handicap…
Dans ce cadre solide, la liberté pédagogique des enseignants leur permettaient l’utilisation de méthodes adaptées à chaque classe, sa composition et ses moyens.

On avait en face l’école privée, non subventionnée, dirigée par le diocèse, mélangeant la religion et l’enseignement. C’était l’école dite libre, libre de ne pas aller à l’École laïque, l’école de tous, l’école de la République. La loi Debré en 1959 fut un premier tournant. L’État par contrat détourne des fonds publics pour financer le caractère propre des écoles privées. Victor Hugo se serait senti trahi, lui qui avait lancé du haut de l’Assemblée nationale  : «  l’État chez lui, l’Église chez elle  ». L’embrouille commence quand l’État prétend que l’enseignement privé concourrait au service public  !

Puis vinrent des « réformes » de l’enseignement public. Les ministères successifs, traumatisés par la grève générale de mai-juin 1968, s’évertuent à noyer le poisson des programmes scolaires dans la bouillabaisse des projets pédagogiques, puis éducatifs, tarte à la crème derrière laquelle ils cachent une volonté politique de la Vème République de démanteler l’Éducation Nationale.

A partir de la loi d’orientation de 1989, loi par loi, décret par décret, circulaire par circulaire, les différents Ministres de l’Éducation Nationale s’engagent dans la dénationalisation de l’enseignement public. Le « projet pédagogique » est utilisé pour donner un beau nom à une réalité bien plus sournoise. Le projet pédagogique, c’étaient les programmes scolaires. Peu à peu cela devient le « projet éducatif de l’établissement » qui prend le pas sur les programmes scolaires nationaux.

L’Enseignement public, sérieusement déstabilisé, est néanmoins resté sous l’autorité de l’Éducation Nationale qui le finance et paye ses personnels fonctionnaires d’État.

Les mois qui viennent diront si l’État s’engage ou non pour sonner le glas de l’Éducation Nationale comme le projet de loi Brisson, les rapports de la Cour des comptes, les Inspections générales et d’autres l’ont annoncé. Les amis de l’École laïque ont-ils un autre choix que de s’unir pour faire barrage tous ensemble au démantèlement de l’Éducation Nationale programmé pour les mois qui viennent  ?

Michel Rolland

LE PROJET DE LOI BRISSON (février 2023)

ADOPTÉ AU SÉNAT POUR ÊTRE SOUMIS A L’ASSEMBLÉE NATIONALE.

DANS L’EXPOSE DES MOTIFS

« L’exposé des motifs » du projet de loi présentée par le Sénateur Max Brisson, intitulé « pour une école de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité », cite le rapport de la Cour des comptes du 14 décembre 2021 selon lequel « la performance globale du système éducatif français reste médiocre malgré l’importance des moyens mobilisés. » Bref, l’école publique coûte cher pour pas grand-chose  !

Il cite le Ministre qui, le 22 décembre 2022, déclare  : « un Français sur deux ne fait pas confiance à l’institution scolaire bien que les 3/4 fassent confiance aux professeurs ».

D’aucuns en déduiraient logiquement que les réformes successives menées sous la 5ème République depuis 1959 n’ont pas amélioré l’institution scolaire, mais l’ont dégradée. A l’inverse, l’exposé des motifs du projet de loi affirme que la crise de l’institution scolaire proviendrait du fait que «toutes les réformes de notre système éducatif, entreprises depuis 60 ans, n’ont eu pour objectif que d’aménager un système vertical, uniforme et oublieux des particularités des établissements alors qu’aucune école, aucun collège, aucun lycée ne se ressemblent ».

En clair, il affirme qu’il ne faut plus « aménager » … mais démanteler le système éducatif national de l’École de la République. Il propose « la création d’établissements publics autonomes d’éducation ».

Comment  ? « Il apparaît désormais que l’autonomie doit s’imposer comme l’antidote aux maux de l’école. Donner une plus grande liberté aux écoles, aux directeurs et aux professeurs est incontournable pour promouvoir le mérite et l’égalité des chances. »

Institutionnaliser « l’autonomie de chaque établissement scolaire » permettrait de promouvoir l’égalité des chances  ? Qui peut le croire  ? N’est-ce pas au contraire débarrasser le ministère de la responsabilité de garantir le même enseignement avec les mêmes programmes annuels et par discipline  avec les moyens nécessaires ?

Ne conduirait-elle pas, à l’inverse, à une concurrence directe entre les écoles publiques  ? N’est-ce pas en réalité ouvrir la voie au libre choix des parents de choisir l’école de leurs enfants  « selon son projet éducatif autonome »  ?

N’est-ce pas démanteler l’école de la République une et indivisible et, au passage, faire sauter la carte scolaire ? N’est-ce pas aligner l’enseignement public sur le fonctionnement des écoles privées sous contrat ayant chacune leur « caractère propre »  ?

Le projet va plus loin encore  : il propose la création « d’établissements publics autonomes d’Éducation avec les collectivités locales volontaires, un contrat avec le Recteur, une autorité hiérarchique aux Directeurs d’école et des contrats de mission… »

Il faudra enlever le mot égalité à la devise de la Nation pour ne garder que celui de liberté au sens où chaque famille aura la liberté de choisir l’École publique de leurs enfants qui ne serait plus la même pour tous.

En 12 articles il s’agit bien de passer de l’Éducation Nationale à « des écoles sous contrat » à l’image des écoles privées. Et dans ces 12 articles, on trouvera également le choix des enseignants par le chef d’établissement, les dérogations possibles aux obligations de service réglementaires et même le renforcement des jardins d’enfants contre l’école maternelle  !

Que ce projet soit soumis ou non au vote de l’Assemblée nationale, il n’en demeure pas moins une arme redoutable pour achever le démantèlement de l’École de la République.

Loi Brisson  : «  Le Sénat part à l’assaut de l’Ecole  »

Le point de vue de François Jarraud dans « Le café pédagogique » d’avril 2023.

Citant le projet de loi, l’auteur souligne d’emblée que « les nouveaux établissements » que le projet propose à l’Assemblée Nationale « seraient gérés comme des établissements privés sous contrat ». « Chaque chef d’établissement pourra choisir ses enseignants et modifier son organisation pédagogique, c’est-à-dire aussi bien déroger à l’organisation des obligations de service des enseignants qu’à la répartition horaire des enseignements ».

« Elle créerait en France l’équivalent des académies britanniques qui disposent de fonds publics pour une gestion totalement libre du service éducatif ».

L’article précise que ce projet vise aussi à « la conformité idéologique des enseignants »  : « les écoles supérieures du professorat organisent des formations de sensibilisation à l’enseignement des faits religieux, à la prévention de la radicalisation, à l’égalité entre les femmes et les hommes, à la lutte contre les discriminations, à la manipulation de l’information, à la lutte contre la diffusion des contenus haineux… ».

Serait-ce, en effet, encore l’École laïque soucieuse de neutralité en matière politique et religieuse et respectueuse de la liberté de conscience des familles qui lui confient ses enfants  ?

L’article rappelle d’ailleurs que le texte du projet de loi « interdit le port de signes religieux aux parents qui accompagnent les sorties » et « exige le port de l’uniforme pour tous les élèves » (sans préciser qui va les payer!).

Il s’interroge également sur les critiques portées à l’égard « du lourd bilan des années Blanquer»  alors que la majorité du Sénat n’a cessé de les soutenir.

Il s’exprime enfin sur l’avenir de ce projet dont « la conformité avec la privatisation de l’Éducation entreprise par Emmanuel Macron  dans une perspective libérale affirmée et réaffirmée tout au long de ces 6 années ». Ainsi. Il rappelle « les rapports de la Cour des Comptes qui demandent l’autonomie des établissements et la révision du statut des enseignants ».

Si on ne sait pas à quelle échéance ce projet trouvera une place dans l’agenda de l’Assemblée Nationale, ce sera un moment où l’avenir de l’École et celui des enseignants se jouera, conclut l’article.

Le journaliste, à qui nous devons de connaître ce rapport, conclut ainsi  :

« Le modèle républicain de l’école française est à peine effleuré, la laïcité n’est cité qu’une fois pour rappeler que l’enseignant  « incarne des valeurs« …

A l’école républicaine, fondée sur la connaissance et l’émancipation, le cabinet de conseil préfère une école-entreprise, tournée vers l’adaptation constante au monde du travail et focalisée sur le savoir-être plutôt que le savoir-faire. Idéal pour préparer les jeunes à  « la flexibilité » du monde du travail et à une société atomisée.

Ferdinand Buisson voulait faire des républicains, Mc Kinsey rêve de faire des « startupers » ».

«  L’articulation entre l’État et les collectivités locales dans le domaine de l’Éducation  »  :

«  L’articulation entre l’État et les collectivités locales dans le domaine de l’Éducation  »  :

Un rapport de l’IGESR* de mars 2022.

Les premières lois de décentralisation avaient déjà donné un rôle de «prestataires» aux «collectivités locales»  : bâti scolaire, transport, numérique… L’État leur demande désormais de dépasser cela pour participer à la définition de « projets éducatifs et à leur conception ».

Ce serait « une co-construction » qui, reconnait le rapport, « peut paraître comme une remise en cause du principe historique des pères fondateurs de l’école républicaine » avec « le principe d’une éducation essentiellement nationale » avec « ses programmes et ses objectifs nationaux ».

Le rapport constate qu’en 2021 «  les politiques éducatives, hors enseignement académique, se développent avec l’appui des collectivités territoriales, d’acteurs publics diversifiés et de partenaires associatifs ». Il cite « les cités éducatives et les territoires éducatifs territoriaux (TER) » pour relancer les PEDT (Projets Éducatifs Territoriaux), lancés en 2014 mais sans grand succès.

Il ajoute que ces « politiques éducatives (territoriales) générées par le contexte de l’accès à l’emploi, concernent tout autant le Ministère du travail et de l’emploi que les collectivités territoriales ».

En termes feutrés, le rapport entend faire comprendre que désormais la priorité de l’État ne serait plus l’Éducation Nationale pour préparer les jeunes générations à des examens et diplômes nationaux reconnus sur l’ensemble du territoire national, mais… « l’accès à l’emploi ». Traduisons  : si le marché de « l’emploi » nécessite une main d’œuvre bon marché, précaire, peu ou non qualifié, alors on ne voit vraiment pas pourquoi l’État devrait assurer gratuitement les formations élémentaires, secondaires, universitaires et professionnelles avec qualification reconnues à la clé ! Cela ne risquerait-il pas d’engendrer des frustrations sources de bien des tensions  et des exigences salariales incompatibles avec la rentabilité des entreprises et les économies budgétaires pour les services publics  ?

Les collectivités territoriales (élus politiques locaux, associations, bassins d’emplois…) sont donc appelées à « coconstruire » des missions de «formations » à la place d’une Éducation Nationale dont le démantèlement est ainsi programmé.

Que deviendraient toutes les disciplines d’enseignement du français, des maths, d’histoire, géographie, sciences, langues vivantes, Éducation physique et sportive, musicale et artistique… dans ce « partenariat » hétéroclite d’intérêts et de responsabilités différentes voire contradictoires  ? Une auberge espagnole  ?

Que vaudraient des certificats « territoriaux », délivrés et donnés à presque tout le monde, mais sans valeur sur le marché du travail  ? Ne parle-t-on pas désormais de recruter des apprentis à bac+2 dont la rémunération serait versée par l’État à l’employeur qui disposera ainsi d’une main d’œuvre gratuite et précaire  ?

Qui prendrait en charge et comment l’enseignement adapté aux élèves en difficulté et/ou handicapés, la médecine scolaire déjà en voie de disparition, les personnels administratifs  et de services ? Les collectivités territoriales  ? Celles-ci, en un an, ont déjà perdu entre 10 et 15 % de leur budget annuel  et ont déjà du mal à financer ce qui leur revient en matière de construction, réhabilitation et entretien des écoles, collèges et lycées  !

Le « Conseil d’Administration » de « l’école territoriale » devra trouver les fonds pour financer «les activités»  qu’il préconiserait  en toute «autonomie».

Serait-ce « une co-construction » ou «une co-destruction de l’Éducation Nationale  »  ?

Le rapport souligne que les collectivités territoriales ont largement pris leur part, en particulier en termes d’investissements, et l’ont fait « face à une Éducation Nationale dont la priorité était d’assurer les enseignements et de rémunérer l’ensemble des personnels qui représentent près de la moitié des fonctionnaires de l’État ».

Il conclut donc en constatant que « cette articulation Etat-collectivités territoriales » étant très inégale, elle exigerait « des décisions de fond qui permettraient d’appliquer réellement le principe de  » libre administration » ».

En clair l’abolition de l’actuelle législation de l’Éducation Nationale pour fonder des établissements scolaires disposant d’une pleine et entière «autonomie». N’est-ce pas ce que formule le projet de loi Brisson  ?

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    * IGESR  : Inspection Générale de l’Education nationale, des Sports et de la Recherche

Le rapport McKinsey commandé par le Ministère de l’Education Nationale sur «  l’évolution du métier d’enseignant  »

Ce rapport du Cabinet de Conseil américain McKinsey, facturé 496  800 €uros, effectué en 2020, n’a été rendu public qu’en 2022. Épingle par la commission d’enquête du Sénat, il a fallu les interventions de David Libeau, développeur, et du journaliste Marc Rees pour qu’il soit mis en ligne.

Ce rapport de 204 pages fait la promotion pour « l’autonomie des établissements scolaires », les rémunérations au mérite et le fonctionnement décentralisé des établissements scolaires. Pour lui, les enseignants ne sont plus uniquement ceux qui transmettent des savoirs, mais doivent offrir « un accompagnement plus global sur des sujets comme le respect de la diversité, le développement durable, l’équité sociale ou l’égalité des sexes… ».

Le recours au numérique devient systématique. Le professeur accéderait à des outils technologiques pour préparer les cours, automatiser la notation, et les seconder dans l’analyse des résultats des élèves. Il préconise des logiciels clés en main (Gradescope ou Schoolrunner). L’enseignant devient gestionnaire analysant courbes, graphiques, pourcentages pour maximiser les résultats.

Tout le rapport est imprégné de la volonté de sensibiliser les élèves « aux opportunités de la société numérique » par exemple « en éveillant leur esprit d’entreprise ». L’Éducation nationale est appelée à « ouvrir ses portes aux entreprises et de baliser des parcours de mobilité… vers le privé ».

Pour les enseignants, le rapport appelle « à des parcours plus individualisés, flexibles et dynamiques » et « à la rémunération au mérite ». « S’ils sont jugés excellents, ils pourraient recevoir des chèques cadeau  ! »

Bien entendu le rapport propose des activités extrascolaires au sein ou hors de l’école (yoga, méditation…) ainsi que des « compétences socio comportementales » (sic  !).

Les professeurs de la maternelle à l’Université deviendraient des sortes de « manager [s] » aidant ses élèves à « brainstormer ». Ils seraient d’ailleurs eux-mêmes « managés » par leur chef d’établissement doté de pouvoirs étendus, notamment dans « l’allocation de ressources financières et humaines.»

«QUELLE AUTONOMIE POUR LES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES»  ?

Une contribution de « FRANCE STRATEGIE 2017/2027 »*

« France Stratégie » a produit, en 2016, un document qui a le grand mérite de formuler très clairement le pourquoi et le comment d’une réforme prioritaire pour les autorités de l’État  : « l’autonomie des établissements scolaires ».

Partant du constat que « les résultats insatisfaisants de notre système éducatif sont le produit du « pilotage centralisé de l’Éducation Nationale » », le document en déduit… la nécessité de rechercher « une plus grande autonomie des établissements scolaires ». Il s’appuie sur la décentralisation vers les collectivités locales et la déconcentration vers les échelons administratifs locaux et les établissements scolaires eux-mêmes, engagées dans de nombreux pays développés.

S’il constate « une érosion de la performance scolaire des élèves de plus en plus en difficulté », c’est immédiatement pour proposer « une autonomie accrue aux établissements scolaires ». Autrement dit la suppression des programmes scolaires nationaux par année et par manière, chaque établissement établirait lui-même ses projets et ses critères d’évaluations des élèves.

N’est-ce pas comme si, pour faire disparaître la fièvre, on décidait de casser le thermomètre  ?

Quant à l’État et son Ministère dans ce schéma, il verrait disparaître ses responsabilités et sans doute aussi les dépenses qui en découlent.

L’autonomie des établissements recouvre plusieurs domaines précise l’étude  : « autonomie de gestion des ressources financières (ventilation des moyens affectés, collecte de fonds), autonomie de gestion des ressources humaines (recrutements des enseignants, octroi de suppléments salariaux), autonomie pédagogique (évaluation des élèves, définition du programme scolaire, grille des cours, expérimentations…) ».

L’étude précise bien que l’autonomie de gestion des personnels et l’autonomie pédagogique sont déterminantes  ! Évidemment puisqu’il s’agit de retirer à l’Éducation Nationale ses plus importantes missions  : les programmes scolaires et le salaire des enseignants basés sur une grille indiciaire de la fonction publique de l’État et non à la tête du client  !

Une telle orientation interpelle quant à la valeur nationale qu’aurait des diplômes obtenus avec cette « autonomie ».

N’est-ce pas, sans encore l’avouer, aller vers l’abolition de la collation des grades et diplômes par l’État  comme des examens et concours nationaux et des copies anonymes  ?

L’étude propose alors plusieurs options possibles.

  • Donner de nouvelles responsabilités à caractère pédagogique aux chefs d’établissements. Mais ce serait la disparition des Inspecteurs de l’Éducation Nationale (IEN pour le primaire et IPR pour le second degré) ainsi que la consécration des inégalités de plus en plus fortes entre établissements.
  • La « contractualisation des établissements »  : avec le ministère et les académies, contrats d’objectifs par établissement, par réseau, avec les collectivités territoriales.
  • Cela suppose une latitude d’action plus importante des Directeurs et chefs d’établissement appelés à gérer  : le recrutement des personnels (sur profil et entretien), la masse salariale (dont les primes collectives d’objectifs et individuelles de performance et de sujétion), les horaires hebdomadaires et annuels de service du personnel… Outre les menaces sur les statuts nationaux des personnels, cette autonomie induit une évaluation de l’établissement « sous contrat » qui se trouve alors en concurrence avec les autres établissements.
  • Des établissements publics disposant tous d’une autonomie dans tous les domaines à l’image des établissements privés  : liberté des moyens, des outils, des méthodes d’enseignement, des programmes, des horaires, des emplois du temps, des calendriers mensuels et annuels, des recrutements au profil en fonction du projet d’établissement, des rémunérations des personnels… Cette option, basée sur l’initiative et la concurrence accroîtrait les écarts de performance entre établissements, reconnaît elle-même l’étude.

Cette discussion est engagée depuis longtemps dans le Ministère de l’Éducation Nationale et les institutions de la 5ème République. « L’École territoriale », préconisée désormais officiellement, s’inscrit pleinement dans ce programme de démantèlement de l’Éducation Nationale dont « l’autonomie des établissements scolaires » est l’arme absolue.

Mais, comme les précédentes « réformes » dans ce sens, elle se heurte au profond attachement en France à l’École laïque, gratuite et obligatoire, la seule école de la République.

« Elle suppose que chaque élève, en quelque point du territoire, puisse bénéficier du même enseignement, selon des programmes identiques, dispensé par des maîtres pareillement formés. Certes des atténuations ont été apportés au fil des ans, mais le principe de l’égalité devant le système éducatif reste, malgré les évolutions, un point d’ancrage de l’opinion publique qu’il serait déraisonnable de méconnaître ». (source  : avis n° 277 du Sénat du 23 avril 1983).

Écrite il y a presque quarante ans, cette appréciation ne reste-t-elle pas d’une brûlante actualité  ?

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*(France Stratégie est une institution placée auprès du Premier Ministre pour contribuer à l’action publique)

« MOBILISER LA COMMUNAUTÉ ÉDUCATIVE AUTOUR DU PROJET D’ÉTABLISSEMENT »

ou quand «la Cour des Comptes» se mêle de l’avenir de l’Éducation Nationale

Rapport public thématique janvier 2023

La synthèse de ce copieux document permet d’aller droit au but des objectifs recherchés.
La Cour des Comptes commence par stigmatiser les résultats insatisfaisants du système éducatif français «en dépit d’une dépense nationale supérieure à la moyenne des pays de l’OCDE». Ce n’est donc pas pour elle une question de moyens si «le système scolaire français ne parvient pas à réduire les inégalités, il tend plutôt à les creuser».

Le coupable, pour la Cour des Comptes, serait «le caractère national de l’institution scolaire en France», «le manque d’évaluation des établissements» et «les ambiguïtés du rôle des chefs d’établissements». Elle dénonce en premier le fait que la moitié des établissements ne sont pas dotés «d’un projet d’établissement» défini avec les représentants de «la communauté éducative» pourtant prévu par le Code de l’Éducation. Bref, les établissements ne sont pas encore assez «autonomes»  !

Selon le rapport, les inégalités sont le résultat d’un «modèle de gestion rigide et centralisé» qui «laisse peu de place à l’appréciation des équipes éducatives». En particulier «en matière d’évaluation des enseignants», il s’agirait de «mieux rétribuer ceux des membres de l’équipe les plus investis».

Le chef d’établissement devrait devenir un vrai patron s’entourant d’une cour de fidèles dont les conditions de travail et de rémunérations dépendraient de lui  !

On remarquera que les Inspecteurs de l’Éducation nationale (IEN dans le primaire et IPR par discipline dans le secondaire) disparaissent.

«Les modalités d’allocation devraient prendre en compte les résultats des évaluations et les contraintes pesant sur le lieu d’implantation de l’Établissement et les coordonner avec les interventions des collectivités territoriales». Autrement dit des budgets au mérite dépendant d’élus politiques territoriaux  !

Les recommandations de la Cour des Comptes vont toutes dans ce sens  : obligation du projet d’établissement préalable à une démarche d’évaluation qui mettrait les établissements scolaires en concurrence les uns avec les autres, confier au chef d’établissement l’évaluation des enseignants, annualiser leurs obligations de service en quantifiant les missions individuelles et collectives, constituer une enveloppe pour valoriser l’investissement d’enseignants, réformer les modalités de recrutement des chefs d’établissement, allocation des moyens en fonction des projets particuliers…

En «favorisant la contractualisation entre établissements, académies et collectivités territoriales», la Cour des Comptes propose tout bonnement d’aligner l’organisation des établissements scolaires sur le fonctionnement des établissements privés sous contrat d’association qui, logiquement, ne peut aboutir qu’au libre choix par les parents de l’établissement scolaire de leurs enfants  et une contribution budgétaire accrue des collectivités territoriales et de fonds privés pour financer les projets… territoriaux!

On remarquera que la définition et la mise en œuvre de programmes scolaires nationaux par année et par discipline disparait totalement… L’établissement délivrerait des «diplômes-maisons»  dont la valeur dépendra… de la réputation de l’établissement.

En tout cas, cette route mène assurément à la casse du service public de l’État en transférant aux établissements scolaires autonomes et aux collectivités territoriales, l’organisation de l’enseignement qui, selon la Constitution, est encore un devoir de l’État à tous les niveaux.

N’est-il pas urgent de réagir tous ensemble  si on veut éviter ce naufrage provoqué de l’École de la République  ?

LA LOI DE 2019 «  POUR UNE ECOLE DE LA CONFIANCE  »…

… qui n’a pas vraiment inspiré confiance.

Promulguée le 26 juillet 2019, alors que le Conseil constitutionnel l’avait déclarée « partiellement conforme à la Constitution », elle fait l’objet de nombreuses critiques et contestations.

Elle abaisse l’âge de l’Instruction obligatoire de 6 à 3 ans et l’obligation de formation de 16 à 18 ans.

Conséquences  ? Aucune pour l’école publique qui scolarise déjà 98% des enfants de 3 ans. En revanche, les Communes devant verser les dépenses de fonctionnement des écoles privées sous contrat avec l’Etat, cela représente une manne importante (on parle d’environ 150 millions) pour les écoles privées (pour l’essentiel catholiques). Les diocèses s’empressent donc d’ouvrir des classes et écoles maternelles en nombre très faible jusqu’à présent puisque non rémunérées par l’Etat (pour les salaires des enseignants de maternelle) et les Communes (dépenses de fonctionnement pour les écoles privées calculées uniquement sur le coût moyen d’un élève de l’Ecole publique mais dans le cadre de l’obligation scolaire).

La loi affirme que l’enseignement primaire doit assurer des savoirs fondamentaux à tous les élèves  :

lire, écrire, compter… Mais, de nouvelles « activités », étant ajoutées aux emplois du temps des classes élémentaires, il faudra donc faire mieux… avec moins de temps  !

La loi permet aux écoles publiques ou privées de mener des « expérimentations pédagogiques »

portant sur l’organisation de la classe ou de l’école, l’utilisation des outils numériques et la répartition des heures d’enseignement sur l’année scolaire. Il ne s’agit pas ici de la « liberté pédagogique » des enseignants qui s’exercent dans le cadre des programmes scolaires nationaux par année et matières d’enseignement. Il s’agit d’allouer des crédits en fonction de la nature du  « projet d’établissement » s’il plait ou non aux partenaires du «projet éducatif territorial »  ! On financerait ainsi la différenciation entre les écoles mises en concurrence pour obtenir des moyens.

«Le Conseil national d’évaluation du système scolaire » est remplacé par « un Conseil d’évaluation de l’École »

qui la met en place dans la logique du renforcement de l’autonomie de chaque établissement sur la base de son « projet éducatif ». L’évaluation ouvre la voie à la concurrence des écoles entre elles.

La création d’Etablissements Publics Locaux d’Enseignement International (EPLEI)

sélectionnant leurs élèves sur « leurs compétences linguistiques » contribuant ainsi à atomiser l’Éducation Nationale sur des critères culturels et sociaux.

La loi inclut « la connaissance des valeurs de la République » dans la formation des enseignants pour l’aborder dans leur classe avec les élèves…

Quand on connaît les multiples définitions et interprétations contradictoires de ces « valeurs », aussi nombreuses qu’il y a de formations politiques et de religions, ne convient-il pas d’être très circonspect sur ce sujet délicat si on ne veut pas transformer les classes et les écoles en champ de batailles idéologiques  ?

La loi « pour l’école de la confiance » ne tient aucun compte des difficultés réelles de l’enseignement public

comme les 4000 postes d’enseignants non pourvus à l’issue des différents concours de recrutement. Le recrutement de  « contractuels » après un entretien de 30 minutes est ainsi non seulement autorisé mais appelé à se généraliser.  Les concours nationaux sont contournés et menacés.

La loi prétend également améliorer la situation inacceptable des AESH dan s le cadre de « l’école inclusive » en leur proposant un CDD de 3 ans renouvelable une fois au lieu de la demande unanime des personnels et des syndicats d’un statut de fonctionnaire catégorie B. Elle maintient les PIAL contestés par les AESH et les personnels des écoles.

Cette loi Blanquer n’a pas donné confiance dans l’École de la République. Bien au contraire puisqu’elle ouvre des portes permettant d’aller vers une plus grande autonomie des établissements.

Mais des écoles autonomes, toutes différentes et à plusieurs vitesses impliquent le recrutement local de personnels en accord avec « le projet territorial ».

Les enseignants étant fonctionnaires d’État n’ont pas eux à obéir aux appétits d’élus politiques, de groupes de pression et d’intérêts privés qui voudraient bien mettre la main sur l’école à leurs profits ou pour dicter aux enseignants ce qu’ils doivent enseigner et comment.

Atomiser l’École de la République implique donc obligatoirement de remettre en cause le statut de fonctionnaires d’État des personnels de l’enseignement public. Les grands services publics que furent la SNCF et la Poste sont passés par là pour basculer dans la privatisation  ! Monter la garde à la porte de l’École de la République contre sa privatisation ne passe-t-il pas désormais aussi par la défense du statut de la Fonction publique  et toutes les garanties d’égalité des droits et de laïcité qu’il permet  ?