L’Éducation Nationale et ses réformes :

repères :

La 5ème République a hérité d’une Éducation Nationale instituée à la suite de lois historiques fondatrices de l’École publique, laïque, obligatoire et gratuite  :

  • Loi Guizot de 1833 instaurant l’obligation de créer une école publique primaire dans chaque Commune de plus de 300 habitants.
  • Loi Falloux de 1850 obligeant l’ouverture d’écoles de filles dans chaque Commune de plus de 800 habitants, mais l’enseignement primaire est partagé entre enseignement public et privé.
  • Loi de 1881, dite loi Ferry instaurant la gratuité de l’école primaire publique.
  • Loi de 1882 instaurant l’obligation de l’instruction primaire, la laïcité de l’enseignement public et l’obligation scolaire jusqu’à 13 ans.
  • Loi de 1886, dite loi Goblet, créant des écoles maternelles.
  • Loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État. L’État ne reconnaît et ne salarie aucun culte.
  • Loi de 1936, dite Jean Zay, instaure l’obligation scolaire jusqu’à 14 ans.

Le régime de Pétain abroge les lois laïques, rétablit l’instruction religieuse dans les horaires scolaires, étend les bourses nationales aux élèves de l’enseignement confessionnel, ferme les écoles normales, supprime les Délégations cantonales (équivalent des DDEN rétablis en 1945).

A la Libération l’Éducation nationale devient un devoir de l’État (préambule de la Constitution).

La première mesure prise par la 5ème République, suite au coup d’État gaulliste de 1958, sera l’adoption de la loi Debré le 31 décembre 1959 instituant le financement par les fonds publics des écoles privées sous contrats (à plus de 90% catholiques).

Toutes les organisations et associations laïques font signer 10  813  697 citoyens (plus de la moitié des votants aux élections législatives de novembre 1958) « pour l’abrogation de la loi Debré et réserver totalement l’effort de la Nation au développement et à la modernisation de l’École de la Nation ». 25  000 délégués des signataires adopteront le Serment de Vincennes de « lutter sans trêve ni défaillance jusqu’à son abrogation ».

Le Ministre Berthoin portera l’obligation scolaire de 14 à 16 ans, créera les collèges d’enseignement technique (CET) et les Cours Complémentaires (qui deviendront les collèges d’enseignement général).

Les réformes de l’Éducation Nationale qui suivront soulèveront à chaque fois oppositions, contestations, protestations, mobilisations qui ne se sont jamais démenties.

  • La Réforme Fouchet de 1963 : mise en place des collèges d’enseignement secondaire (CES) avec une logique de filières.
  • La réforme Fouchet puis Peyrefitte des Universités en 1967  : les étudiants avec l’UNEF y verront une sélection déguisée. La brutale répression contre les étudiants exigeant son abrogation sera la mèche qui enflammera le pays en mai-juin 1968.
  • La loi Haby de 1975, qui instaure « le collège unique », n’enraye pas les inégalités et aggrave les disparités entre établissements.
  • 1981-82  : Alain Savary crée  « les zones d’Education prioritaire » (ZEP) instituant la différenciation des établissements scolaires selon leur composition sociale.
  • Le projet de réforme Savary-Legrand préconise de favoriser « l’autonomie des établissements », leur ouverture à des « partenaires » que seraient les collectivités territoriales, associations et entreprises… La réforme est rejetée. Le Ministère propose alors… « le volontariat des établissements ».
  • La proposition du Conseil des Ministres du 2 août 1982 de mettre en place l’EIP (Etablissement d’Intérêt Public) incarne « le service public unifié » réunissant établissements publics et privés sur la base de leur propre «projet éducatif particulier ». Il s’agissait de dénationaliser l’enseignement public éclaté en une mosaïque d’établissements et de continuer le financement des écoles privées par l’État. Les contestations de cette tentative furent telles que le projet fut abandonné.
  • La loi de décentralisation du 22 juin 1983  définissait néanmoins les collèges et lycées comme des « Établissements publics locaux d’enseignement (EPLE) », disposant d’une autonomie sur un certain nombre de questions, notamment l’utilisation des moyens pédagogiques (article R 421 – 2 du Code de de l’éducation).
  • La loi d’orientation sur l’éducation de 1989, présenté par le Ministre Jospin, abandonne « le service unifié d’enseignement », mais supprime les Écoles Normales pour transférer la formation des enseignants à l’Université (IUFM), soumet les établissements scolaires au « projet d’établissement », au « Contrat Éducatif Local » et à « la communauté éducative ». Elle débouche sur « le Code de l’Éducation » qui inclut au fur et à mesure et chaque année les lois, ordonnances, décrets et circulaires édictés par l’État concernant l’Éducation Nationale.
  • La loi Montchamp de 2005 procède à l’intégration des enfants handicapés et/ou en grandes difficultés dans les établissements scolaires ordinaires sans tenir compte de la nature et du degré de leur handicap. Cela donnera « l’école inclusive » sans engagement de l’Etat de fournir les moyens adaptés nécessaire pour réussir une intégration, mais permettant par contre de réduire chaque année le nombre et les moyens des établissements et personnels spécialisés.

La situation très difficile des AESH, le plus souvent à temps partiels avec des salaires largement inférieurs au SMIC, remet à l’ordre du jour la question de la prise en charge des enfants en difficulté et/ou handicapé dans les établissements scolaires.

  • La loi de 2005 « d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école » présenté par le Ministre Fillon connaîtra, avec son « contrat première embauche » (CPE), la plus importante mobilisation lycéenne jamais vue dans notre pays. Elle sera promptement retirée.
  • Le projet de réforme présenté par le Ministre Darcos en 2008 dans le but de supprimer de nombreux postes et plusieurs disciplines parmi les enseignements obligatoires, devra lui aussi être retiré.
  • La loi de juillet 2013 « d’orientation et de programmation pour la refondation de l’École de la République » a proposé d’installer de nouveaux rythmes scolaires selon le bon vouloir des élus politiques locaux. Le rejet a été indiscutable. Elle voulait inscrire les EPLE dans leur « territoire » afin d’élaborer « les politiques éducatives » en mobilisant les ressources du territoire sur la base d’un diagnostic partagé avec l’ensemble « des partenaires » par « le projet éducatif territorial ». En clair, « une autonomie » amorçant la sortie de nos écoles de l’Éducation Nationale.

La loi définit dans ce cadre 4  « parcours éducatifs »  : les parcours Avenir, santé, artistique et culturel, citoyen. Les programmes scolaires nationaux par année et par discipline sont appelés à disparaître au profit « d’activités diverses » définies localement. La réduction des heures des enseignements fondamentaux par matière aboutit à passer de 30 heures en 5 jours de classe par semaine à 24 heures en 4 jours. Ce n’est déjà plus en allègement mais des amputations. L’Etat constatera ensuite la baisse de niveaux des élèves à leur entrée en 6ème de collège!

« La loi pour l’École de la confiance » de juillet 2019 abaisse l’instruction obligatoire de 6 à 3 ans et permet ainsi la création de nombreuses classes maternelles… dans les écoles privées sous contrat avec des fonds publics versés par les Communes. Une manne pour les écoles confessionnelles  !

La loi prétendait garantir la maîtrise des savoirs fondamentaux à tous les élèves, mais sans les moyens pour l’assurer.

L’orientation officielle vers « l’école territoriale » mènerait logiquement vers la disparition des programmes scolaires nationaux, des examens et diplômes nationaux au profit du profil individuel… qui n’est évidemment pas reconnu dans les conventions collectives et les statuts. On pourra payer un jeune à bac +2 comme un apprenti. N’est-elle pas aussi de sortir les personnels de la fonction publique de l’Etat pour aller vers le recrutement local sur la base du « projet éducatif territorial »  géré par « la communauté éducative territoriale »  ?

Tous les rapports, propositions et projets de loi, comme la loi Brisson, vont dans ce sens.

L’École de la République, face à cette entreprise de démantèlement de l’Éducation Nationale, est à nouveau sérieusement menacée. N’a-t-elle pas un besoin urgent que se rassemblent tous les amis de l’école publique pour la défendre  ? C’est à cela que le Délégué Laïque vous propose de travailler.