Questions à Denise et Michel Landron, respectivement Vice-Président et Secrétaire Général de l’Union des DDEN de Maine-et-Loire.

Le Délégué laïque : L’Union Départementale des DDEN de Maine-et-Loire a rendu public la résolution unanime de son Conseil d’Administration du 14 janvier 2023 alertant les DDEN et tous les ami(e)s de l’École laïque sur le projet de « territorialisation de l’École publique ». Depuis, plusieurs documents officiels ont été publiés allant dans ce sens. Que proposez-vous ?

D.M.Landron : Nous avons un Conseil d’Administration qui se réunit le 10 juin où un rapport sera présenté informant les collègues des différents rapports, contributions et déclarations publiques proposant cette « territorialisation » et ses conséquences. Elle suppose en effet la remise en cause de la législation actuelle (Constitution, lois, décrets et circulaires) qui confie encore à l’Éducation Nationale l’organisation de l’enseignement public dans notre pays.

Passer de l’Éducation Nationale à des « établissements autonomes » cogérés par des conseils publics-privés de territoire signerait l’abandon définitif des programmes scolaires nationaux par année et par discipline préparant à des examens et diplômes nationaux reconnus dans tout le pays. Ceux-ci deviendraient des chiffons de papier sans valeur autre que la réputation de l’établissement qui l’aura délivré. Ce serait l’inégalité des droits institutionnalisée ouvrant une concurrence entre les établissements rendant légitime le libre choix des parents pour l’école de leurs enfants, comme c’est déjà le cas avec l’école privée avec son caractère propre.

En collège, par exemple, les élèves suivent encore, des programmes par année et par discipline. Ex : en histoire, en 6ème : la préhistoire et l’Antiquité, en 5ème : le Moyen-Âge etc… Et ce, même en musique ou EPS. Si la formation des élèves passe entre les mains d’un « Conseil éducatif autonome » avec entreprises locales et Élus politiques territoriaux, quelle importance que des élèves destinés à une embauche précaire d’une industrie ou petite entreprise locale de savoir ce qu’est le « romantisme au XIX ème  siècle » ou « la Révolution française »  ou le « siècle de Louis XIV… » ? Ce serait l’appauvrissement généralisé de toute la population et l’asservissement au territoire… Nous ajouterons dans ce cadre le projet de démantèlement des lycées professionnels au profit de l’apprentissage sur le tas d’une main d’œuvre gratuite pour le patronat.

Nous ajouterons que les personnels de l’Éducation Nationale qui pourrait être recrutés localement par « l’établissement autonome » perdraient rapidement leur statut de fonctionnaires d’État. N’a-t-on pas vu déjà des enseignants recrutés comme contractuels… par Pôle Emploi ?

Les DDEN ne peuvent que s’inquiéter de cette orientation, eux qui sont en quelque sorte des gardiens de l’égalité des droits et du respect des normes de l’Éducation Nationale dans chaque et tous les établissements scolaires. L’Union Départementale de Maine-et-Loire n’écarte pas l’idée d’en appeler à toutes les associations et organisations laïques en faveur d’une union nécessaire si le projet de loi Brisson, adopté par le Sénat le 11 avril, était présenté à l’Assemblée nationale.

Le Délégué laïque : Votre Union, comme celle des Bouches-du-Rhône, a été exclue de la Fédération Nationale présidée par Eddy Khaldi. Cela a-t-il un rapport avec les enjeux que vous venez d’exposer ?

D.M.Landron :Nous rappellerons que la Fédération Nationale a exclu notre Union avec un seul et unique chef d’accusation formulé par écrit par le Président Eddy Khaldi : avoir accepté dans ses rangs Denise et Michel Landron après leur nomination en Maine-et-Loire par le DASEN à qui il avait demandé par courrier (juin 2021) de ne pas nous présenter dans la liste soumise au vote du CDEN . Nous disposons de tous les documents qui attestent de cet arbitraire inégalé dans l’histoire de la Fédération. La liberté de conscience, de pensée et d’expression n’existe plus dans la Fédération devenue nationale au dernier Congrès avec des nouveaux statuts assurant la toute-puissance du Président et de son équipe.

Ce n’est sans doute pas un hasard si le Président Khaldi signe des éditoriaux dans sa publication « La Lettre du DDEN » dans lesquels il n’aborde jamais la question du démantèlement programmé de l’Éducation Nationale. Il ne voit que la concurrence publique-privée. Les DDEN quant à eux sont logiques avec leur propre histoire : si le principe « à École publique fonds publics » reste le leur, ils ne sauraient oublier la défense de l’École publique, laïque, gratuite, obligatoire, la même pour tous les enfants du pays, mise en péril par le projet d’École territoriale.

L’avenir proche dira si la Fédération nationale relaiera ou non les Unions et les DDEN qui souhaitent un large rassemblement unitaire pour mettre en échec ce projet de démantèlement.

Le Délégué laïque : Que proposez-vous pour que les échanges et la libre discussion se développe entre DDEN et avec les diverses composantes du mouvement laïque qui, en certaines circonstances, avaient su se rassembler en défense de l’École laïque, la seule École de la République ?

D.M.Landron : Des DDEN de différents départements qui se connaissaient depuis plusieurs années, inquiets par le cours suivi par la Fédération sous le règne d’Eddy Khaldi, attachés à la souveraineté des Unions Départementales et à la libre discussion fraternelle, ont constitué le CLRUA, Comité de Liaison pour le Rassemblement des Unions, des Associations de DDEN et des DDEN.

Qu’ils soient membres ou non de la Fédération, ces DDEN nommés par le DASEN de leur Département et officiant dans une école publique (ou plusieurs), échangent sur les questions qui intéressent les DDEN dans l’exercice de leurs fonctions officielles (définies par des articles du Code de l’Éducation) ou Associatives (relevant de la loi de 1901 comme toutes les Unions de DDEN). Le CLRUA s’est donné une Charte précisant ses objectifs et fonctionnement.

Ils ouvrent un Site et un blog pour informer et faciliter les échanges et se réunissent une fois par mois en visio-conférence. Cette année 2023, l’Union du Maine-et-Loire en assure l’organisation et la Présidence.

La prochaine réunion du 21 juin du CLRUA fera le point de la situation et des contacts pris afin d’aller vers la plus large union possible d’Unions de DDEN, d’Associations et organisations laïques en défense de l’École de la République désormais à la croisée des chemins.

Pour tout contact : ddenunion49@gmail.com