Les DDEN sont « des fonctionnaires bénévoles » dont l’indépendance est officiellement reconnue.
Ils ont non seulement le droit, mais aussi le devoir, de signaler aux autorités en charge des écoles (IEN, DASEN, Recteurs, Préfets, Ministre, Municipalités) ce qui apparaît clairement comme des insuffisances, des manques ou des dégradations dans les conditions de la vie scolaire, la sécurité des élèves et des personnels, les cantines scolaires, les activités post et périscolaires…
Ils siègent dans les Conseils d’Ecole, où leur présence est un atout précieux pour rassembler personnels et parents élus sur la même cause de défense de l’École publique qui doit rester nationale et disposer des moyens nécessaires pour accomplir ses missions d’enseignement auprès des jeunes générations.
Ils peuvent participer aux initiatives de défense de l’École laïque et de la laïcité des institutions de l’État. Ils ont le droit de travailler avec les amis de l’Ecole laïque, en premier lieu les personnels et leurs syndicats, les parents et leurs associations.
S’ils ne doivent pas intervenir sur les questions pédagogiques qui ne sont pas de leur ressort, par contre ils peuvent soutenir et participer aux actions visant à convaincre les autorités à faire droit aux demandes légitimes et incontestables en faveur de l’École publique.
Le côté « lanceur d’alerte » de leurs missions auprès des autorités n’est pas toujours bien accueillis par des Élus ou des DASEN. Ils ne mesurent pas toujours que la scolarité des enfants a, certes un coût, mais pas de prix.
Mais, quand on connaît la situation de certaines écoles des quartiers populaires de Marseille ou de Seine-St-Denis, comment pourrait-on demander à un DDEN de ne rien dire et de ne rien faire pour améliorer ces situations inadmissibles, alors que c’est précisément leur mission essentielle ?
Souvent débordés par une surcharge de travail découlant des innombrables consignes (souvent changeantes) qu’ils reçoivent sans préoccupation de leur faisabilité et des moyens nécessaires à mettre en œuvre, les Élus et les IEN bénéficient de l’apport des DDEN qui attirent leur attention sur des questions qui, négligées, pourraient se transformer en véritables scandales.
Qu’est-ce qui peut donc justifier l’entreprise sectaire et autocratique du Président Khaldi et de son équipe organisant une « normalisation » de la Fédération Nationale et des Fédérations départementales ?
La lecture des dernières « Lettres du DDEN » apportent de premières réponses.
Tentant (difficilement) de justifier la dissolution de l’Union des Bouches-du-Rhône, un article de 2 pages½ de la Lettre n° 190 du 1er mars 2021, signé Pierre Mimran, nouveau Président de DDEN-BDR-13 le répète à plusieurs reprises : les DDEN et leur Fédération Départementale doivent s’inscrire « résolument et de façon militante dans le cadre fédéral ».
Pour Khaldi et son équipe, les « reconnaissances institutionnelles confèrent à la Fédération, le droit exclusif de représenter les DDEN et d’agir auprès des pouvoirs publics en leur nom… ».
En clair, les Fédérations départementales et les Unions locales ne devraient plus avoir de souveraineté de décisions. Leurs positionnements et leurs actions ne devraient plus être librement et démocratiquement définis par leurs instances, en premier lieu l’AG statutaire annuelle, mais uniquement par le « Président Khaldi » et son équipe.
Dans le réquisitoire publié, aucun fait précis n’est rapporté qui apporterait des preuves indiscutables rendant crédible la proposition de dissolution de l’Union des Bouches-du-Rhône. Quant au droit élémentaire de la partie accusée de présenter sa défense à égalité avec le réquisitoire de Mrs Mimran et Khaldi, il est tout simplement refusé.
En Seine-Saint-Denis les 7 DDEN de Sevran sont exclus de la Fédération sans avoir pu se défendre dans l’Assemblée Générale départementale comme l’exige les statuts.
Au Fédéralisme, le Président Khaldi et son équipe substitue un centralisme bureaucratique pour imposer au lieu de convaincre, exclure au lieu de débattre librement. C’est le coup d’État permanent.
Mais, pour imposer quelle orientation ?
Dans les Bouches-du-Rhône et dans la Seine-Saint-Denis, c’est explicite : les DDEN qui signaleront la situation réelle des écoles dans lesquelles ils exercent leurs fonctions, les Unions Locales et les Unions Départementales qui signaleront la situation réelle des écoles de leur Commune et de leur Département devront garder secrètes ces situations, sous peine d’exclusion.
Ils devront surtout, ne rien entreprendre avec les amis de l’École publique pour être écoutés et entendus des autorités concernées.
La pandémie a tout accentué en exerçant ses ravages depuis plus d’un an dans les écoles qui, de plus en plus, deviennent des clusters de contaminations des personnels et des familles via les élèves.
Cherchez dans les Lettres du DDEN éditées par la Fédération nationale. Vous ne trouverez pratiquement rien sur la situation réelle des écoles confrontées à des protocoles inapplicables et sans les moyens nécessaires pour protéger les personnels, les élèves et les parents. N’est-ce pas, pourtant, inscrit dans la Constitution comme un devoir de l’État ?
Aucune campagne sérieuse avec les amis de l’École publique pour obtenir masques homologués, tests pour tous pour identifier les contaminés et organiser leur isolement, recruter du personnel (en particulier les listes complémentaires du concours, des ATSEM, des AESH, des personnels de santé scolaire…) et, enfin une vaccination massive et gratuite, en particulier des personnels, mais aussi des parents pour se diriger vers la fin d’une pandémie qu’il faudra bien éradiquer le plus vite possible.
Au lieu de ces mesures de protection indispensable, le « Président Khaldi » signe des éditoriaux sur l’égalité hommes-femmes, la violence à l’école et autres sujets, certes intéressants, mais passant à côté de la souffrance des écoles qui manquent de tout pour faire face à la pandémie.
La Lettre du DDEN du 1er avril 2021 réussit même le tour de force d’interviewer le Ministre Jean-Michel Blanquer sans lui faire part une seule fois des demandes d’urgence pour assurer la protection des personnels, des élèves et de leurs familles, alors qu’elles permettraient seules d’éviter des fermetures d’école devenant inévitables, quand les personnels et de plus en plus d’élèves sont révélés positifs, les enfants menaçant leur famille.
Par contre, Eddy Khaldi dans son éditorial nous annonce que la Fédération sous couvert de son concours national « se construire citoyen » se place « sous le haut parrainage du Ministère de l’Education Nationale, de la jeunesse et des sports et le marrainage du Ministère de l’Intérieur avec la Ministre déléguée à la citoyenneté » !
Les mêmes Ministres qui se mobilisent sous le parrainage du Président de la République pour faire passer une loi sur la « sécurité globale » remettant en cause les droits et libertés démocratiques de tous les citoyens ! Une autre loi dite « pour conforter les valeurs de la République » remet en cause la loi de 1901 sur les Associations et la loi de 1905 de Séparation des Églises et de l’Etat.
L’indépendance des DDEN vis à vis des autorités politiques et de l’Education Nationale était le mérite et la vertu principale des DDEN et de leur Fédération. Sous l’autorité du Président Khaldi, c’est la marche à l’aliénation de la Fédération des DDEN aux autorités qui est en marche.
Au moment où le mouvement laïque cherche à se rassembler en défense des droits et libertés démocratiques sérieusement menacés par les lois liberticides que le Président Macron veut faire passer au pas de charge à l’ombre de la pandémie, les DDEN se rappelleront du rôle important qu’ils ont joué à l’époque où, avec le CNAL et le mouvement ouvrier et démocratique, ils agissaient ensemble contre la loi Debré et les lois antilaïques et antiscolaires de la Vème République autoritaire et antidémocratique.
Dans les mois qui viennent va donc se jouer le sort de la Fédération Nationale des DDEN pour qu’elle puisse retrouver une place de partenaire à part entière dans le mouvement laïque, que Khaldi, avec le « Collectif national laique » et l’UFAL s’efforcent de fracturer.
La messe n’est donc pas dite, sauf si les Fédérations départementales acceptaient la « normalisation » engagée qui signifierait l’éclatement de la Fédération Nationale.
Michel Bureau