Editorial – Le Délégué Laïque n°4

DDEN, il y a encore loin de la coupe aux lèvres, mais la roche Tarpéienne n’est jamais loin du Capitole

Si notre envie était de faire parler de nous, alors, sans conteste possible, le Congrès national des DDEN de Rennes nous aurait comblés. De la tribune aux parvis, il a été beaucoup question du « Délégué laïque ». Un monde inquiet sent la crainte du libre débat et de la libre recherche.

Libre à chacun de brandir les fourches caudines d’une nouvelle Inquisition qui voudrait faire taire toutes celles et tous ceux qui s’interrogent, mais force restera à la liberté de conscience. C’est aussi cela la laïcité et sa défense.

Le Délégué laïque n’a pas d’autre ambition que de poser publiquement des questions que nombre de DDEN se posent sur le cours actuel de la Fédération nationale des DDEN. C’est ce qui semble déranger son Président et son « équipe fédérale », taillée sur mesure pour la circonstance.

Ces questions sont si prégnantes et si vitales, que la résistance à tout cours nouveau s’est fortement exprimée, que cela soit par le rappel de l’exigence de l’abrogation des lois antilaïques, dont la loi Debré, que d’une prise de distance affichée (mais sera-t-elle réelle ?) de la loi Blanquer.

Mais cela suffira-t-il à inverser le cours des choses qui fait que la « grande ambition » du Président de la FN DDEN soit d’être « reconnu » et de devenir l’auxiliaire zélé du gouvernement qui ne cesse de mener des offensives de destruction de l’École publique. Reconnu par qui et pourquoi ?

Tout est encore devant la FN DDEN : la roche tarpéiennes ou le Capitole. Ou les deux à la fois, mais dans quel ordre ?

La motion adoptée sur les « accompagnants scolaires » est révélatrice à ce sujet. Elle corrobore pleinement la campagne xénophobe de la chasse aux musulmans. Elle a une apparence, mais elle n’a aucune réalité dans les faits. Elle peut être contresignée par des gens qui ne représentent qu’eux-mêmes, mais cela fait-il une force ?

Réclamer que soit mise en place une « fonction d’auxiliaire bénévole » pour les accompagnatrices, au moment où le gouvernement Macron/Philippe privatise à tour de bras la Fonction publique, c’est ramer contre la falaise. Ce gouvernement privatise tout au nom du calcul égoïste du Capital et de la Finance et il « fonctionnariserait » de fait les accompagnatrices scolaires ?

C’est se moquer du monde laïque que d’essayer d’emmener les militants laïques sur cette voie de garage qui n’est qu’une impasse au mieux ou une diversion au pire. Mais les diversions comme l’Appel des 113 ne sont que des tentatives de division de plus.

Le congrès national 2019 des DDEN montre que cela ne sera pas aussi simple que cela pour les « auxiliaires bénévoles » du gouvernement. En ces temps de disette électorale, pour paraphraser le dénommé « saint Paul », tout est permis, mais tout ne sera pas profitable.

La question de la réalisation de l’unité réelle des laïques pour s’opposer à la révision-destruction de la loi de 1905 et pour l’abrogation de la loi Blanquer restera posée par le mouvement laïque, en dépit des turpitudes des uns et des autres.

Albert Camus ne disait-il pas dans Les Justes : «  C’est tellement plus facile de mourir de ses contradictions que de les vivre. »

Paul Feldmann