De nombreux DDEN s’interrogent sérieusement sur le cours suivi par la Direction Nationale sous l’impulsion d’Eddy Khaldi, le Président. Dans plusieurs domaines qui relèvent de nos missions nous constatons des évolutions qui, loin de nous rassembler en toute indépendance en défense de l’Ecole laïque, ne peuvent que provoquer des débats conflictuels dans nos Fédérations Départementales et mettre en péril la Fédération elle-même.
Le plus grave de ce point de vue est sans aucun doute l’attitude de la Fédération Nationale sur la question laïque, au cœur de l’actualité et de nos engagements. Comment comprendre que le Président ait impulsé et organisé le boycott de la réunion commune des organisations et associations laïques du 22 novembre 2018, à l’initiative de la Ligue de l’Enseignement?
Comment comprendre que le Président n’ait jamais proposé que la Fédération Nationale soit signataire de l’appel commun qui en est sorti le 30 novembre rassemblant la plupart des grandes organisations laïques, avec le soutien des organisations syndicales UNSA, FSU, FO, CGT ? Or, cet appel commun oppose l’application complète de la loi de 1905 à la volonté affiché de l’exécutif présidentiel de la réviser pour « réparer les liens brisés entre l’Etat et les Eglises » ?
Comment comprendre que le journal national de la Fédération de février 2019 n’ait pas publié cet appel ? Le Journal publie par contre un autre appel, beaucoup moins représentatif, du « Collectif national laïque » qui dit à peu près la même chose. Le Président Eddy Khaldi n’a aucune excuse pour vouloir diriger la Fédération contre le rassemblement de toutes les associations laïques face à la menace de révision de la loi de 1905. D’ailleurs, l’UNSA et le CNAFAL, membres du Collectif Laïque, sont signataires des deux.
Enfin, Eddy Khaldi a-t-il seulement informé le Bureau National et les Fédérations Départementales qu’une nouvelle réunion unitaire des associations laïques s’est tenue, à l’initiative de la Libre Pensée, le 28 février 2019, réunion coprésidée avec la Ligue de l’Enseignement et le Grand Orient de France ?
Le positionnement hostile au rassemblement unitaire des laïques ne peut qu’inquiéter les DDEN dont la vocation est précisément de participer, sans exclusive, au rassemblement des forces laïques en défense de la loi de 1905 contre sa révision – après son viol avec les lois anti laïques permettant de distribuer 12 milliards de fonds publics aux écoles catholiques en 2018.
La question laïque est toujours une pierre angulaire de la République.
C’est un fait, la plupart des mesures en matière d’Education Nationale prise par les pouvoirs publics ne cachent pas une volonté de l’Etat de démanteler l’Education Nationale au nom d’une « territorialisation de l’Ecole » qui permettrait à l’Etat de transférer les établissements scolaires publics sous la coupe des élus politiques territoriaux et d’autres financements que les fonds publics. Nous le voyons bien, nous DDEN, dans l’exercice de nos missions de signalement de tout ce qui ne va pas dans les écoles et d’interventions auprès des autorités responsables (DASEN, Mairie, Préfet) pour que soient respectées et garanties les exigences de conditions correctes de la vie scolaire.
Nous voyons en particulier les conséquences concrètes dans nos écoles publiques des réductions budgétaires imposées aux Municipalités par l’Etat et « des réformes » le plus souvent pilotées pour réduire les dépenses publiques de l’Etat en matière scolaire et dénationaliser l’enseignement public.
Dans ce contexte difficile, il apparaît évident que l’indépendance des DDEN et leurs missions définies par les textes sont comme une épine dans la botte des pouvoirs publics. Ils admettent de plus en plus difficilement que nous respections notre engagement d’intervenir à chaque fois que nécessaire pour le bien être des élèves et des personnels dans l’Ecole de la République.
Nous apprenons qu’à Lyon un collègue DDEN a ainsi été radié de ses fonctions pour avoir signalé que des prêtres circulaient tous les jours dans la Mairie où se trouve l’école publique. Inimaginable que le Président ait laissé faire une chose pareille !
Nous apprenons qu’en Seine-Saint-Denis, c’est un IEN qui condamne les DDEN d’une Commune parce qu’ils ont collationné les comptes rendus des Conseils d’Ecole où ils siègent et dans lesquelles figurent toutes les demandes des parents avec leurs associations, des personnels avec leurs syndicats pour que l’hygiène, la sécurité, l’entretien, la restauration, le chauffage répondent aux critères obligatoires dans une Ecole publique…
Transformer les DDEN en supplétifs des autorités, un peu comme « des collaborateurs », est une orientation qui ne se cache même plus, quand on nous demande de ne plus rien signaler et ,quand nous le faisons, de ne surtout pas intervenir avec les amis de l’Ecole publique que sont en particulier les syndicats des personnels qui y travaillent.
Les DDEN sont souvent des « anciens » dont la sagesse est reconnue. Que nous le regrettions ou pas, nous devons constater que ce qui reste du CNAL depuis la disparition du Syndicat National des Instituteurs, ne peut plus prétendre au monopole pour rassembler autour de lui le mouvement laïque avec le mouvement ouvrier et démocratique en défense de la laïcité et de l’école publique.
Imposer, comme le fait Eddy Khaldi, que la Fédération Nationale ne devrait travailler qu’avec les organisations qui lui plaisent n’est ni dans la tradition, ni dans la nature même des DDEN. Nous travaillons tous les jours avec les personnels et leurs syndicats, les parents élus dans les Conseils d’Ecole et leurs associations, avec les Unions locales et Départementales des syndicats et avec toutes les associations qui se réclament de la séparation des Eglises et de l’Etat, notamment la Libre Pensée sans laquelle la loi de 1905 n’aurait jamais vu le jour.
L’ostracisme politicien que jette Eddy Khaldi à l’égard de la Libre Pensée et de certains syndicats n’est plus supportable.
Il est temps que la discussion s’ouvre entre les DDEN sur ces questions dont dépend l’avenir proche de notre Fédération Nationale.
Michel Bureau
De toute évidence, il faut que les prises de position des uns et des autres soient claires. Je me souviens vaguement que les réserves de certains de mes collègues par rapport à nos partenaires institutionnels relevaient plus de la forme que du fond. C’est dommage de vouloir absolument changer les mots pour dire les mêmes choses. Il me semble souhaitable que de telles dérives fassent l’objet d’une franche explication et que notre président accepte qu’une idée forte soit exprimée avec les nuances que la diversité impose.
Je ne manquerai pas, soyez-en sûr, de suivre de très près l’évolution de nos rapports avec l’ensemble du monde laïque.