Contribution de la délégation des DDEN de Sevran sur la loi Blanquer.

DDEN – Délégation de SEVRAN (93) le 17 mai 2019
Délégués Départementaux de l’Education Nationale de Sevran

Dans le pays se discute actuellement le projet de loi intitulé « pour l’Ecole de la confiance », présenté par le Ministre de l’EN, Mr Blanquer et adopté en première lecture par l’Assemblée Nationale.

Les DDEN de Sevran ont pu constater, dans leurs écoles et sur la ville, que ce projet de loi soulève une importante contestation émanant de nos partenaires que sont les enseignants et leurs syndicats, les parents d’élèves et leurs Associations qui en demandent majoritairement le retrait.

Interpelés, nous avons donné notre avis en précisant qu’il était un avis personnel qui se trouve être défavorable pour les 7 DDEN qui composent la délégation sevranaise.

Nous avons établi nos constats communs sur les points essentiels suivants :

  • Le rappel du « devoir d’exemplarité » des enseignants a été très mal pris par celles et ceux qui accomplissent un travail au quotidien avec les élèves dans des conditions de travail et de vie scolaire souvent de plus en plus difficiles. Il suggère que les enseignants porteraient la responsabilité de ces difficultés, ce qui justifierait que ce rappel intervienne en premier point
    de la loi. C’ela nous apparait aussi injuste que dangereux. Cette stigmatisation des enseignants par les autorités et dans la loi ne pourrait que travailler à la perte de confiance des parents envers les enseignants présumés coupables des difficultés de l’enseignement public, alors qu’il
    dépend avant tout de la responsabilité de l’Etat.
  • De même, le rappel désormais systématique du « devoir de réserve des fonctionnaires » y compris en dehors de l’exercice de leurs fonctions (ce que ne dit pas le statut de la FP) est ressenti comme une remise en cause de leur liberté d’opinion et d’expression. Les remontrances et les sanctions qui touchent des enseignants ayant donné publiquement leur avis négatif sur la
    loi de Mr Blanquer ne peut qu’inquiéter tous les amis des libertés démocratiques et des droits de l’homme.
  • L’article portant sur l’école maternelle soulève également une forte réprobation des personnels et des parents. L’obligation scolaire à partir de 3 ans n’a, en soi, aucun intérêt puisque que plus de 97% des enfants sont déjà scolarisés à cet âge-là.
    Par contre, en vertu des lois anti laïques en vigueur (lois Debré, Guermeur, Carle…) il en découlerait l’obligation pour les Municipalités de financer les écoles maternelles privées. Le CNAL a évalué entre 150 et 200 millions le montant de cette manne supplémentaire aux écoles privées (à plus de 90% catholiques).
    La mise en concurrence de l’école maternelle publique, laïque et gratuite avec des structures type « jardins d’éveil » aboutiraient à considérer ces structures comme l’équivalent des écoles maternelles… mais sans aucun enseignant, ni ATSEM, ni RASED ! Ce serait un pas important vers… la privatisation du service public.
  • L’architecture de la loi est basée sur une « territorialisation de l’Ecole » que les DDEN ont toujours soumis à leur examen critique. Les parents en particulier insistent sur l’égalité des droits des enfants qui ne peut être garantie que par des programmes scolaires nationaux, le statut de fonctionnaire d’Etat des enseignants chargés de les mettre en œuvre et la laïcité de l’institution scolaire républicaine.
    En transférant la responsabilité des établissements scolaires à la tutelle de «partenaires territoriaux » (dont les élus politiques) sous couvert de «projets éducatifs locaux », la loi démantèlerait l’Education Nationale pour autoriser l’Etat à se désengager de ses responsabilités. La crainte « d’écoles à plusieurs vitesses » est au cœur des inquiétudes des parents, des
    personnels et d’élus locaux qui ne revendiquent absolument pas de se substituer aux responsabilités de l’Etat et de l’Education Nationale, bien au contraire, en particulier pour la délivrance des diplômes nationaux et des qualifications professionnelles. Ils craignent avec un transfert de compétences l’approfondissement généralisé des inégalités et des transferts de financements.
    Les enseignants voient aussi dans cette loi une remise en cause de leur statut découlant du statut de la FP de 1948, également en discussion à l’Assemblée Nationale.
  • Transformer les Directeurs d’école en supérieur hiérarchique de leurs collègues, le tout mis sous tutelle d’un Principal de collège, est largement réprouvé dans les écoles. Ce serait une cassure des équipes pédagogiques et la marche vers « un management », comme dans le privé, source de
    conflits permanents. L’IEN serait dessaisi de ses responsabilités de veiller à la bonne marche du service public.
  • La contractualisation des personnels prévue dans le projet de transformation de la fonction publique ouvrirait la possibilité pour l’Etat de ne plus recruter sur concours ouvrant droit à une formation ; mais à multiplier des recrutements locaux précaires, instables et soumis à l’arbitraire administratif, contraire aux garanties auxquels les enseignants ont droit pour exercer leur métier sereinement.

Une telle loi ne peut qu’aggraver les désordres dans l’école publique, mécontenter les personnels et les parents et nuire aux droits des enfants d’accéder dans les meilleures conditions possibles, et à égalité de droits, à un enseignement public de qualité délivrant des diplômes et des qualifications reconnus sur l’ensemble du territoire national et dans toutes les conventions collectives et les statuts.

La délégation sevranaise des DDEN estime en conséquence que le Congrès National de Rennes, dans sa tradition historique de défense de l’Ecole de la République – qui doit rester une, indivisible et laïque – ne peut que confirmer son engagement de toujours en demandant aux autorités de l’Etat d’abandonner cette loi.


La délégation sevranaise rappelle que les missions des DDEN sont définies nationalement dans les articles du Code de l’Education pour veiller à l’égalité des droits des élèves dans l’Ecole de la République, où qu’elle se trouve et quels que soient les élus politiques. Ils veillent en particulier au
respect PAR TOUS des conditions de la vie scolaire définies dans les textes nationaux officiels. Jamais la Fédération Nationale n’a revendiqué de remplacer ces missions par une participation active avec des élus politiques locaux et des Associations de droit privé à la mise en place de « projets
éducatifs territoriaux ». Ce serait participer à la dénationalisation de l’Enseignement public.


Pour les 7 DDEN de la délégation sevranaise

Christie Vigliano, Présidente des DDEN de Sevran,
Denise Landron, Secrétaire, deniselandron@orange.fr – 06 30 72 81 44