Motion pour l’abrogation de la loi Debré et consorts

MOTION VOTÉE A L’UNANIMITÉ DES PRÉSENTS A L’AG DU 29 MAI 2024 DE L’UD31

Les propos tenus contre l’enseignement public par l’éphémère ministre de l’Éducation nationale, Amélie Oudéa-Castéra, ainsi que les constats accablants consignés dans les rapports de la Cour des comptes de juin 2023 et de la mission d’information de l’Assemblée nationale de mars 2024 mettent concrètement à l’ordre du jour la remise en cause du financement public de l’enseignement privé sous contrat, pour l’essentiel catholique. Celui-ci constitue une brèche béante dans la Séparation des Églises et de l’État et s’avère un puissant dispositif d’accroissement des inégalités sociales et scolaires.

Ce pourquoi nous demandons l’abrogation des loi anti laïques et des dispositions issues notamment des lois Debré, Falloux et Astier qui constitue le passage obligé pour respecter le principe selon lequel les fonds publics doivent être exclusivement destinés au financement de l’enseignement public dont l’organisation est le seul « devoir » de l’État selon le Préambule de la Constitution de 1946 repris en 1958.

Dévoiement de la laïcité dans le sport : un cadeau fait aux séparatistes (1)

Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, et le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, se sont opposés à la ministre des Sports, Marie Barsacq et à la ministre de l’Éducation nationale, ancienne Première ministre, Élisabeth Borne, à propos de l’interdiction de tout signe ostensible dans le sport amateur, en compétitions (en ciblant tout accessoire, même serré et équivalent à un bonnet serré, qui remplacerait un voile ou foulard musulman). Rappelons que le droit actuel permet déjà d’interdire tout signe ou accessoire qui s’opposerait à la tenue réglementaire prévue par les fédérations pour assurer la bonne pratique sportive.

Aller au-delà, c’est s’opposer à la laïcité qui ne prévoit la neutralité ou des restrictions qu’à ceux qui exercent un service public ou qui sont vulnérables. C’est aussi ouvrir la porte à la subjectivité et donc, potentiellement, à tout type de discriminations. Le Conseil constitutionnel, malgré sa composition plus politique que juridique, comme la Cour européenne des Droits de l’Homme pourraient ainsi contester une telle disposition législative.

Pourtant, l’actuel Premier ministre, François Bayrou, a donné raison à ses deux ministres régaliens, des hommes. Ainsi, le Gouvernement a réaffirmé son soutien à la proposition de loi sénatoriale qui prévoit une telle interdiction, au mépris du principe de laïcité, pourtant honteusement mis en avant. En 2004, la Commission Stasi, à l’origine de la loi du 15 mars 2004 contre le port de signes ostensibles à l’école, rappelait que cette loi ne saurait s’imposer à des adultes disposant de leurs droits et qui ne sont plus en phase d’apprentissage du savoir, c’est-à- dire au-delà d’une période où ils doivent librement développer leur esprit critique.

Cette même Commission, que personne n’oserait qualifier« d’islamo-gauchiste » ou de « naïve face à l’entrisme frériste », rappelait : « Les fondements du pacte social sont sapés par un repli communautaire plus subi que voulu au sein de quartiers relégués par le développement de discriminations fondées sur les origines. L’existence de discriminations, reflet d’un racisme persistant, contribue à fragiliser la laïcité. La perte d’identité, vexatoire, fait douter de la réalité de l’égalité et du respect effectif de tous les hommes et femmes. Si la mention ou la marque supposée d’une origine fait obstacle à l’insertion sociale, il ne faut pas s’étonner ensuite qu’une sorte de conscience “victimaire” conduise à valoriser a contrario cette origine, voire à la mythifier en exacerbant la différence. La grandeur des principes ne saurait être en aucun cas démentie par la bassesse des pratiques, sauf à ouvrir la voie à ceux qui exploitent les sentiments defrustration pour leurs desseins communautaristes. »

Aujourd’hui, donc, la France propose une législation inédite dans le monde, à l’exception des régimes nord-coréen, iranien ou saoudien, au nom d’une « laïcité » dévoyée, contraire à la pensée de ses fondateurs, Aristide Briand, Jean Jaurès ou Georges Clemenceau, et tous ceux qui à droite les ont rejoints pour l’adoption de la loi du 9 décembre 1905 dont nous fêtons les 120 ans. Ce ne sera pas faire honneur à ce texte que d’adopter une loi, dont l’exposé des motifs – qui affirme un continuum entre le port du voile et le terrorisme – est une insulte envers des millions de femmes. Voter une telle loi n’est en rien « courageux ». C’est au contraire le signe d’un grand renoncement, préférant la simplicité contre-productive à une action résolue mais électoralement moins « payante » : renforcer la mixité socio-culturelle partout, en particulier dans le sport, pour lutter contre les replis au sein de quartiers ségrégués ou de conditionnements sociaux.

La Vigie de la Laïcité

(1) publié le 18/03/2025 par Vigie de la Laïcité Avec Vigie de la Laïcité

La laïcité ce n’est pas le racisme, c’est l’universalisme

Apparemment aujourd’hui tout le monde est pour la Laïcité, de l’extrême-droite à une certaine « Gauche » qui inclut notamment Manuel Valls en passant par Emmanuel Macron et François Bayrou. Quand on voit leurs discours contre les Musulmans, désignés comme l’Ennemi public n°1, il y a alors une tendance à assimiler racisme et laïcité. Or, c’est tout le contraire

La vieille antienne de tous les racistes serait que l’Islam est une religion à part et « arriérée », c’est ce qui expliquerait qu’on applique à ses adeptes ou présupposés adeptes, un traitement particulier et discriminatoire. Il suffit de lire l’ouvrage « La Libre Pensée dans le Monde arabo-musulman » (voir présentation ci-dessous) pour faire litière de cette ignominie raciste et xénophobe.

La Révolution française va poser le cadre juridique du traitement de toutes les religions, sans aucune discrimination. L’Article 10 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 stipule une fois pour toute la conception de la laïcité : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi. » Le « Nul » en question n’a pas vocation à s’appliquer uniquement aux citoyens Français, mais bien à l’Humanité toute entière. Ce principe est donc bien universaliste et contraire à toute idée de racisme et de discrimination.

La loi de 1905 de Séparation de TOUTES les Églises (religions) et de l’État de 1905 va poursuivre ce chemin en faisant en sorte que toutes les religions soient traitées à égalité par une non-reconnaissance par la puissance publique. « Reconnaissance » est un terme juridique qui ouvre des droits, par exemple quand des parents reconnaissent un enfant, ils lui ouvrent des droits et s’imposent des devoirs envers lui.

Le corollaire de cela est que les « croyants » de toutes les religions ont les mêmes droits que les non-croyants. Tous sont égaux, il ne peut y avoir une quelconque discrimination du fait de croyances ou supposées croyances ou non-croyances. Tous les citoyennes et citoyens sont strictement à égalité. La Laïcité est la véritable synthèse des trois grands principes établis par la Révolution française et établis par la République comme moyen : Liberté-Égalité-Fraternité.

C’est pourquoi, la Laïcité est l’antithèse absolue du racisme, car elle impose un traitement égalitaire à tout le monde, sans aucune distinction. La Laïcité distingue la sphère publique (État, administrations, collectivités publiques) où certaines règles de neutralité doivent être respectées, justement pour ne faire aucune discrimination de quelque sorte que ce soit envers les citoyens et usagers ; et la sphère privée (tout le reste) où chacun est libre d’exprimer ses opinions de la manière qu’il souhaite. La Laïcité, c’est la Liberté mise en œuvre effectivement.

La Vème République est antilaïque par nature et par essence

La Vème République est tout le contraire de ce principe. Par la loi Debré de 1959, elle favorise outrageusement l’Église catholique et son œuvre principale : l’enseignement catholique financée sur les fonds publics (12 milliards chaque année). Quand Lionel Jospin, Premier ministre en 2002 institue une instance de dialogue avec l’Église catholique, et uniquement avec la succursale du Vatican (d’ailleurs le nonce apostolique, ambassadeur du « Saint-Siège » est membre officiel de cette instance), il favorise outrageusement le Catholicisme, au détriment des autres religions, dont l’Islam qui est la deuxième religion en France en termes de fidèles.

Quand Emmanuel Macron reçoit à l’Élysée le culte israélite et participe es-qualité à une cérémonie religieuse comme la Hanoucca ou quand il fait un discours comme Président de la République dans la cathédrale catholique de Notre-Dame (ce qui est interdit par la loi de 1905), il viole la laïcité et fait œuvre de discrimination envers les autres religions, comme l’Islam, le Protestantisme, le Bouddhisme et les Athées et Libres Penseurs qui n’ont pas droit aux mêmes faveurs que le Catholicisme et le Judaïsme.

L’affaire Betharram a montré aux yeux de tous la discrimination institutionnelle antilaïque et raciste des gouvernements de la Vème République. Il existe les pires turpitudes dans l’enseignement catholique, chaque cas dévoilé soulève l’horreur et l’indignation, il est financé massivement sur les fonds publics et n’est jamais contrôlé par la puissance publique, alors que les écoles privées musulmanes sont en proie à un véritable harcèlement de contrôles, de répression, d’intimidation en tous genres et fermées, même illégalement par le pouvoir.

« Selon que vous serez musulmans ou pas, les jugements vous rendront noirs ou blancs ». Les violations de la Laïcité ne peuvent qu’entrainer le racisme, car tous ne sont pas traités à égalité.

Christian Eyschen

Drapeaux en berne sur les édifices publics et présence à Rome

Emmanuel Macron et François Bayrou violent la loi de 1905 de Séparation

Aux termes de l’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. » À ceux de l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la Séparation des Églises et de l’État « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. » En dépit de ces dispositions, le Premier ministre, M. François Bayrou, vient d’annoncer la mise en berne des drapeaux sur les édifices publics à l’occasion des obsèques du Pape, chef du culte romain, le 26 avril 2025.

Cette décision constitue une violation caractérisée de la laïcité en faveur de la religion catholique de la part du chef du Gouvernement qui en est un ardent fidèle, au point d’avoir en permanence étouffé des pratiques pénalement répréhensibles ayant eu lieu dans un établissement scolaire sous contrat du diocèse de Pau.

Au surplus, bien que le Vatican ne soit qu’un pseudo-État, crée par le fasciste Mussolini en 1929, siégeant sur un strapontin d’observateur à l’Organisation des Nations-Unies, le Président de la République, flanqué des ministres de l’Intérieur et des Affaires étrangères, piétinera également la loi de Séparation en se rendant aux obsèques de Jorge Bergoglio. Rappelons que le dit « Saint-Siège » est quasiment le seul pays au monde où il n’y a jamais eu d’élections démocratiques, où il est interdit de faire grève et d’être syndiqué, qui n’a jamais ratifié la moindre déclaration sociale de l’OIT, qui n’a jamais ratifié non plus la Déclaration universelle des Droits de l’Homme et qui, comme « l’État » d’Israël et l’Arabie-Saoudite, est une Théocratie où la nationalité est obtenue exclusivement par la religion officielle.

Contrairement à ce que M. Emmanuel Macron a soutenu dans son discours des Mureaux du 20 octobre 2020, annonçant la loi liberticide dite « Séparatisme » du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, le Séparatisme ne se trouve pas du côté des musulmans, mais bien des agents de l’Église romaine infiltrés au cœur de la République.

La Fédération nationale de la Libre Pensée dénonce avec force ces dérives cléricales et appelle les citoyens à participer massivement au meeting national laïque et international du 6 décembre 2025 au Gymnase Japy convoqué pour célébrer le cent-vingtième anniversaire et défendre la loi du 9 décembre 1905.

Paris, le 24 avril 2025

Faut-il inscrire la loi de 1905 dans la Constitution ?

Alors que les institutions de la Cinquième République montrent des signes évidents d’agonie depuis la réélection du président de la République en mai 2022, entré par effraction sur la scène politique en 2017 à la faveur de l’effondrement des partis traditionnels ayant soutenu le régime de pouvoir personnel en place depuis 1958, d’aucuns proposent à nouveau d’inscrire dans la Constitution du 4 octobre 1958 les deux premiers articles de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État. Cette proposition entend ainsi sanctuariser la liberté de conscience, celle de culte et le principe selon lequel l’État « ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. » Il s’agit en réalité d’une fausse bonne idée. De surcroît, les expériences récentes invitent à la plus grande prudence en la matière.

Une perspective sans véritable objet

La proposition de constitutionnalisation des deux premiers articles de la loi du 9 décembre 1905 méconnaît à la fois la jurisprudence du Conseil constitutionnel et la pratique du juge administratif.

La liberté de conscience figure d’ores et déjà dans le bloc de constitutionnalité. Dans sa décision du 23 novembre 1977((C, 23 novembre 1977, n° 77-87 DC.)), le Conseil constitutionnel l’a érigée en principe fondamental reconnu par les lois de la République au regard de l’article 10 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789 : « Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 10 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi » ; que le Préambule de la Constitution de 1946 rappelle que « Nul ne peut être lésé dans son travail ou son emploi en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances » ; que la liberté de conscience doit donc être regardée comme l’un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ; »

Lorsque le juge administratif se prononce, de son côté, sur la légalité d’actes susceptibles de porter atteinte à la loi du 9 décembre 1905, comme en matière de présence d’emblèmes religieux sur des emplacements publics, il établit une étroite imbrication entre l’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958, repris de celle du 27 octobre 1946, et les dispositions du texte de 1905. Ainsi, à propos de l’illégalité de l’installation de crèches de Noël dans les locaux abritant le siège d’une collectivité territoriale, le Conseil d’État motive ses décisions d’annulation en considérant notamment ce qui suit : « Aux termes des trois premières phrases du premier alinéa de l’article 1er de la Constitution :  » La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. « . La loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État crée, pour les personnes publiques, des obligations, en leur imposant notamment, d’une part, d’assurer la liberté de conscience et de garantir le libre exercice des cultes, d’autre part, de veiller à la neutralité des agents publics et des services publics à l’égard des cultes, en particulier en n’en reconnaissant ni n’en subventionnant aucun.

Ainsi, aux termes de l’article 1er de cette loi : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public  » et, aux termes de son article 2 : « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. » Pour la mise en œuvre de ces principes, l’article 28 [a] pour objet d’assurer la neutralité des personnes publiques à l’égard des cultes [en interdisant] l’installation par celles-ci, dans un emplacement public, d’un signe ou emblème manifestant la reconnaissance d’un culte ou marquant une préférence religieuse.»1 Pour le Conseil, les articles 1ers de la Constitution et 1 et 2 de la loi de 1905 forment donc en quelque sorte un tout indissociable.

Le précédent de la constitutionnalisation de l’interruption volontaire de grossesse et la frilosité du Conseil constitutionnel

En second lieu, la constitutionnalisation nouvelle de la liberté d’avorter devrait susciter la réflexion chez ceux qui veulent emprunter la même voie en matière de séparation des Églises et de l’État. De même, deux décisions récentes du Conseil constitutionnel devraient les conduire à tempérer leurs ardeurs.

Alors qu’aucune menace juridique sérieuse ne pesait sur la législation en vigueur en cette matière, la loi constitutionnelle du 8 mars 2024 relative à la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) devrait faire réfléchir ceux qui entendent introduire les deux premiers articles de la loi du 9 décembre 1905 dans la Constitution du 4 octobre 1958. Elle a créé un quatrième alinéa à l’article 34 déterminant le champ de compétence du pouvoir législatif ainsi rédigé : « La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse. »

Elle donne au législateur le pouvoir d’encadrer la liberté de recourir à l’avortement sans garantir un droit effectif. Désormais, en théorie, le Parlement pourrait même déterminer des conditions d’exercice de la liberté d’avorter plus strictes que celles actuellement prévues aux articles L. 2212-1 à L. 2212-11 du Code de la santé publique. En la matière, le véritable enjeu réside davantage dans les moyens dévolus à la pratique de l’IVG dans les établissements de santé que dans l’introduction d’un nouvel alinéa dans l’article 34 : or, ils ont sérieusement diminué. Bref, cette loi constitutionnelle, très largement votée, constitue une illusion sur le plan juridique.

Par ailleurs, imaginons que François Hollande, en application de la proposition 46 de son programme, ait réussi à faire introduire in extenso les articles 1er et 2 de la loi du 9 décembre 1905 dans la Constitution du 4 octobre 1958dans la foulée de son élection de mai 2012, moyennant par exemple la création d’un article 1 bis ou 1-1. Il est probable que le Conseil constitutionnel aurait pris les mêmes décisions que celles qu’il a rendues les 21 février 2013 et 22 juillet 2022.

L’expérience du Statut d’exception clérical d’Alsace-Moselle

Saisie d’une question prioritaire de constitutionnalité en 2012 tendant à lui demander de déclarer contraires à la Constitution du 4 octobre 1958 « […] l’article VII des articles organiques des cultes protestants de la loi du 18 germinal an X relative à l’organisation des cultes » applicables dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, l’institution de la rue Montpensier, se fondant sur les articles 10 de la Déclaration du 26 août 1789 et 1er de la Constitution, a rappelé « que le principe de laïcité figure au nombre des droits et libertés que la Constitution garantit; qu’il en résulte la neutralité de l’État ; qu’il en résulte également que la République ne reconnaît aucun culte ; que le principe de laïcité impose notamment le respect de toutes les croyances, l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction de religion et que la République garantisse le libre exercice des cultes; qu’il implique que celle-ci ne salarie aucun culte ; ».

Pour autant, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution l’article VII des articles organiques du culte protestants applicables dans les trois départements de l’Est de la France au seul motif « qu’il ressort tant des travaux préparatoires du projet de la Constitution du 27 octobre 1946 relatifs à son article 1er que de ceux du projet de la Constitution du 4 octobre 1958 qui a repris la même disposition, qu’en proclamant que la France est une « République. . . laïque », la Constitution n’a pas pour autant entendu remettre en cause les dispositions législatives ou réglementaires particulières applicables dans plusieurs parties du territoire de la République lors de l’entrée en vigueur de la Constitution et relatives à l’organisation de certains cultes et, notamment, à la rémunération de ministres du culte »((CC, 21 février 2013, n° 2012-297 QPC.)). L’introduction des articles 1er et 2 de la loi du 9 décembre 1905 en 2012 n’aurait rien changé à cette motivation, d’ailleurs très fragile, fondée sur l’absence de travaux sur ce point de la part des auteurs des Constitutions de 1946 et 1958.

De même, dans une décision du 22 juillet 2022 répondant à une QPC, au regard des termes de l’article 10 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789, le Conseil constitutionnel a jugé que l’introduction d’une procédure de reconnaissance des associations cultuelles à la main des préfets, décrite au nouvel article 19-1 de la loi du 9 décembre 1905 issu de celle du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, n’est pas contraire aux principes fondamentaux de la laïcité de la République, bien qu’elle constitue manifestement une entorse très grave à l’article 2 du texte fondateur de la séparation et de la laïcité en France2 : « […] les dispositions contestées [celles de l’article 19-1] ont pour seul objet d’instituer une obligation déclarative en vue de permettre au représentant de l’État de s’assurer que les associations sont éligibles aux avantages propres aux associations cultuelles. Elles n’ont ni pour objet ni pour effet d’emporter la reconnaissance d’un culte par la République ou de faire obstacle au libre exercice du culte, dans le cadre d’une association régie par la loi du 1er juillet 1901 ou par voie de réunions tenues sur initiatives individuelles. »3

Ce raisonnement bancal – la vérification préalable du caractère cultuel d’une association ne serait pas une forme de reconnaissance d’un culte ni contraire au principe fondamental de la liberté de conscience – aurait été sans aucun doute le même dans l’hypothèse où les articles 1er et 2 de la loi du 9 décembre 1905 auraient figuré dans le texte de la Constitution du 4 octobre 1958 depuis 2012 : au lieu de se fonder sur l’article 10 de la Déclaration du 26 août 1789, il se serait appuyé sur virtuel 1 bis ou 1-1 issu de la loi de 1905.

Notons que ceux qui réclament à cor et à cri la sanctuarisation des deux premiers articles de la loi du 9 décembre 1905 n’ont pas bougé le petit doigt pour contester sa révision assez profonde intervenue en août 2021, à la faveur du vote de la loi dite « séparatisme ». Au contraire, ils ont soutenu sans barguigner le gouvernement. Il y a l’esbroufe, il y a l’action. La Libre Pensée est du côté de l’action et dénonce l’esbroufe qui sert de rideau de fumée.

La Fédération Nationale de la Libre Pensée

  1. CE, Ass., 9 novembre 2016, Commune de Melun, n° 395122. []
  2. Beaucoup d’associations cultuelles protestantes sont actuellement contraintes de justifier leur caractère cultuel auprès de l’autorité administrative. []
  3. CC, 22 juillet 2022, n° 2022-1004 QPC. []

Lettre aux parents d’élèves, particulièrement à ceux qui mettent leurs enfants dans le privé

Pourquoi et comment sortir du financement public de l’enseignement privé ?

Chers parents d’élèves,

L’enseignement public, gratuit et laïque délivre une instruction générale, technologique ou professionnelle à plus de huit enfants scolarisés sur dix. Son organisation « à tous les degrés est un devoir de l’État », selon le préambule de la Constitution. Néanmoins, presque deux élèves sur dix fréquentent des établissements privés sous contrat financés aux trois quarts par les impôts prélevés sur la richesse nationale par l’État et les collectivités territoriales, soit une somme globale de l’ordre de douze à treize milliards d’euros chaque année, supérieure au budget du ministère de la Justice (dix milliards en 2024). Selon le rapport public thématique de la Cour des comptes de juin 20231, la proportion des élèves de l’enseignement privé varie nettement en fonction du stade du cursus scolaire : elle atteint 21% des effectifs dans le second degré et moins de 14% dans l’enseignement pré-élémentaire et élémentaire.

Les motivations religieuses de ceux d’entre vous qui choisissent d’inscrire leurs enfants dans un établissement privé sous contrat paraissent très secondaires, sinon inexistantes. En dépit de la progression fulgurante de l’indifférence religieuse en France, les classes sous contrat des écoles, des collèges et des lycées privés relèvent, en effet, presque exclusivement de l’enseignement catholique. Pourtant, en 2018, 58% des Français se déclaraient sans religion et 32% seulement se considéraient catholiques, plus par tradition que conviction. Le pourcentage de ceux assistant régulièrement à la messe représentait moins de 5% de la population2.

En réalité, la décision d’inscrire vos enfants dans un établissement catholique procède parfois d’un état de fait, souvent d’une opinion défavorable à l’Enseignement public. Dans certains départements de l’Ouest de la France métropolitaine vous n’avez pas véritablement le choix de l’établissement d’accueil de vos enfants compte tenu du monopole réservé à l’enseignement catholique dans nombre de communes ou de cantons. Plus généralement, notamment au stade du collège – la différenciation des pourcentages indiqués plus haut l’atteste -, beaucoup d’entre vous considèrent, à tort ou à raison, qu’un établissement privé garantirait davantage la réussite de vos enfants que l’enseignement public. La diminution des moyens dévolus à celui-ci nourrit sans aucun doute vos craintes et contribue, en tout état de cause, à dégrader sinon le contenu de l’instruction du moins les conditions dans lesquelles elle est dispensée.

Pourquoi faut-il mettre un terme au dualisme scolaire reposant sur un financement public de l’enseignement privé ?

Avant de répondre à cette question, chers parents d’élèves, sachez que les partisans d’une École publique bénéficiant à titre exclusif de la partie du produit de l’impôt prélevé sur la richesse nationale nécessaire à l’accomplissement de ses missions dans des conditions optimales défendent avec la plus extrême détermination la liberté de créer et d’administrer des établissements privés intégralement financés sur fonds privés. En effet, la liberté de l’enseignement est le corollaire indispensable de celle de conscience garantie par la loi du 9 décembre 1905 concernant la Séparation des Églises et de l’État. D’ailleurs, elle ne saurait véritablement exister, pour les établissements privés, en dehors d’une totale indépendance financière vis-à-vis de l’État. Avant même l’entrée en vigueur de ce texte, l’article 2 de la loi dite Goblet du 30 octobre 1886 sur l’organisation de l’enseignement primaire ne prévoyait-il pas déjà deux types exclusifs de financement : « Les établissements d’enseignement primaires peuvent être publics, c’est-à-dire fondés et entretenus par l’État, ou privés, c’est-à-dire fondés et entretenus par des particuliers et des associations. » ?

Outre les dérives induites par l’absence de tout contrôle réel de l’emploi des deniers de la nation par les établissements privés qui en bénéficient, le financement public de l’enseignement catholique sous contrat fait prospérer le dualisme scolaire et nourrit, par suite, une profonde division dans la République et sa jeunesse. Les travaux les plus récents le montrent, qu’il s’agisse du rapport de la Cour des comptes de juin 2023 ou de celui de la mission d’information parlementaire d’avril 2024 : il entraîne un accroissement constant des inégalités sociales et scolaires et constitue la source d’un véritable séparatisme dans une société française minée, par ailleurs, par des fractures de tous ordres. Il se repaît des moyens retirés à l’enseignement public. Dans leur enquête publiée dans la revue La Pensée, Stéphane Bonnéry et Pierre Merle soulignent que l’enseignement public a perdu 200 000 élèves (- 2% environ) et 56 000 professeurs (- 7%), de 1998 à 2022, tandis que les établissements privés accueillaient 100 000 enfants de plus (+ 5% environ)3. La saignée dans les effectifs de professeurs de l’enseignement public a profité incontestablement aux établissements catholiques. Cette situation est inacceptable parce qu’elle tourne le dos à la promesse républicaine d’une instruction d’excellence pour tous les élèves.

Comment peut-on mettre fin au financement public de l’enseignement privé ?

En dépit de la signature en trois mois, en 1960, par près de onze millions de Français, soit pratiquement le quart de la population d’alors, d’une pétition du Comité national d’action laïque (CNAL), avec le soutien des associations laïques comme la Libre Pensée et du mouvement ouvrier syndical (CGT et CGT-Force Ouvrière), demandant l’abrogation de la loi du 31 décembre 1959 sur les rapports entre l’État et les établissements d’enseignement privés, la perspective de la sortie du système de financement public de ces derniers est demeurée lointaine, d’autant que nombre d’organisations laïques ont longtemps mis au rayon des accessoires le Serment qu’elles avaient prêté à Vincennes, en juin 1960, de tout mettre en œuvre pour obtenir son abolition.

Néanmoins, les temps changent. Intimement liée à la Cinquième République, la loi dite Debré fait désormais l’objet d’un regain de contestation : la crise de l’une suscite de sérieuses critiques de l’autre. De surcroît, maladroites mais empreintes de la plus vive sincérité, brutales mais conformes aux convictions profondes du cercle des proches du Président de la République Emmanuel Macron, les déclarations de Mme Amélie Oudéa-Castéra ont soulevé l’indignation de nombreux Français : en janvier 2024, l’éphémère ministre de l’Éducation nationale du gouvernement dirigé par M. Gabriel Attal a violemment critiqué l’Enseignement public en fustigeant les absences non remplacées des instituteurs affectés à l’école communale où elle avait inscrit son plus jeune fils en maternelle et en valorisant le collège-lycée d’élite Stanislas, un établissement catholique sous contrat du chic sixième arrondissement de Paris. En réalité, elle a travesti la vérité pour soutenir sa cause : la directrice de l’école publique a démenti les propos de Mme Amélie Oudéa-Castéra qui souhaitait obtenir, en réalité mais sans succès, un saut de classe pour le jeune enfant.

Dans ces conditions, l’exigence d’une sortie du système de financement public de l’enseignement privé sous contrat prend aujourd’hui les couleurs de l’urgence. Naturellement, l’abrogation des dispositions du Code de l’éducation issues de la loi du 31 décembre 1959 nécessite des mesures d’accompagnement : il est inimaginable de laisser brutalement en déshérence deux millions d’élèves, plus de cent trente mille professeurs de l’enseignement privés rémunérés par l’État et quatre-vingt mille autres salariés de droit privé. Par conséquent, des mesures transitoires doivent permettre de sortir progressivement du cadre institué par la loi Debré à partir du 1er janvier 1960. C’est à quoi travaille la Fédération nationale de la Libre Pensée (FNLP) dans le cadre d’un large collectif réunissant des Associations laïques et des organisations syndicales d’enseignants.

Chers parents d’élèves, que vos enfants fréquentent l’enseignement public ou les établissements privés sous contrat, votre souhait et vos intérêts sont les mêmes : vous aspirez à un enseignement public assurant une instruction d’excellence en faveur de toute la jeunesse de la République, sans distinction, sans séparatisme. Par suite, il convient de lui donner les moyens nécessaires d’y parvenir et d’en finir avec le financement public de l’enseignement catholique auquel sont alloués douze à treize milliards d’euros prélevés sur les budgets de l’État et des collectivités territoriales. Seule l’organisation de l’Instruction publique « à tous les degrés est un devoir de l’État ».

Pour ceux dont les enfants fréquentent l’enseignement privé, soyez convaincus que notre action laïque ne vise pas à vous pénaliser en quoi que ce soit. Nous voulons simplement défendre un principe : c’est à l’État d’assumer la charge d’instruire tous les enfants de la République, sans séparatisme social, politique, religieux, ethnique ou géographique. Tous les enfants du pays doivent avoir les mêmes possibilités de s’instruire et de construire leur avenir par l’obtention de diplômes et de connaissances utiles pour cela.

Les parents doivent avoir le libre choix d’inscrire leurs enfants dans l’enseignement de leur choix, mais nous considérons que ce choix doit être pleinement libre et non pas être dicté par les difficultés créées par l’incompétence et le refus de donner tous les moyens à l’enseignement public du fait des choix politiques des gouvernements, quels qu’ils soient.

Tel est le sens de notre démarche.

Chers parents d’élèves, soyez assurés de nos sentiments républicains les plus sincères et les plus fraternels.

La Fédération nationale de la Libre Pensée,
La plus ancienne association laïque de ce pays

  1. Cour des comptes, L’Enseignement privé sous contrat, juin 2023. []
  2. Anne-Laure Zwilling, L’Évolution religieuse contemporaine en France, CNRS-Université de Strasbourg-Église protestante unie de France (EPUdF), avril 2024. []
  3. Stéphane Bonnéry, Favoriser l’école privée : 20 ans de politiques économiques, et Pierre Merle, Embourgeoisement des collèges privés et résultats PISA, in La Pensée, n° 419, juillet-septembre 2024, pages 89 à 102 et pages 103 à 117. []